Une scène de « Princesse Sunhwa » au Folk Theater Pung-nyu de Séoul, le 3 décembre 2024. © Kim Seon Ah / Korea.net
Par Lee Kyoung Mi et Kim Seon Ah
Lorsqu’elle assiste à une représentation d’une troupe de théâtre exclusivement composée de femmes, Yun Jeong Nyeon se met en tête de devenir actrice et décide de quitter sa ville natale de Mokpo pour Séoul, où elle intègrera la troupe.
Cette histoire, qui prend forme au lendemain de la guerre de Corée, est racontée dans le drama
Jeongnyeon : la naissance d'une étoile. La série revient sur une frange oubliée des arts coréens qu’est le Yeoseong Gukgeuk, un mélange de théâtre, de dialogues chantés et de folklore qui a connu son apogée dans les années 50 et 60 avant de disparaître avec l’avènement du cinéma et de la télévision. Une occasion rare et unique pour les femmes de l’époque de s’exprimer sur la scène d’un théâtre.
Le succès de
Jeongnyeon : la naissance d'une étoile a incité l’Agence de l'héritage coréen à remettre le Yeoseong Gukgeuk au goût du jour en organisant un événement exclusif intitulé
Women Who Became Legends.
Le spectacle, qui s'est déroulé à guichets fermés, a débuté par une discussion avec les actrices vétéranes du Yeoseong Gukgeuk et s’est poursuivi par une représentation d’un classique du genre,
Princess Seonhwa, qui raconte l’histoire d’amour entre la princesse Seonhwa, de Silla, et Seo-dong, de Baekje. Face à ce succès, le spectacle a donné lieu à deux autres représentations, le 7 décembre.
Les actrices vétéranes du Yeoseong Gukgeuk participent à une discussion au Folk Theater Pung-nyu de Séoul, le 3 décembre dernier. © Lee Kyoung Mi / Korea.net
« Les rôles masculins sont particulièrement importants dans le Yeoseong Gukgeuk », a expliqué Hong Seong-deok, actrice et présidente de la Korea Association Women's Traditional Musical. « Pour bien jouer un homme et attirer l’œil du public, il faut être capable de danser, de parler, de chanter et de s’habiller comme un homme », a-t-elle ajouté.
Les personnages masculins du Yeoseong Gukgeuk étaient extrêmement populaires à l’époque, témoigne Lee Ok-cheon. « J’ai déjà reçu des lettres d’amour de la part de fans féminines ! », s’est-elle exclamée. Le 3 décembre, certaines spectatrices ont même demandé aux acteurs de jouer leur mari. « De nos jours, c'est du jamais vu », selon Kim Hye-jeong, présidente de la Pansori Society et animatrice de la discussion.
Les actrices de « Women Who Became Legends » saluent le public du Folk Theater Pung-nyu de Séoul après leur représentation de « Princess Seonhwa », le 3 décembre 2024. © Agence de l'héritage coréen
Pour Kim Geum-mi, qui joue Seo-dong, la force du Yeoseong Gukgeuk réside dans son maquillage, qui se différencie fortement des autres arts coréens, dans ses costumes, authentiques et réalisés à la main, et dans le fait que toutes les actrices soient des femmes. « Le Yeoseong Gukgeuk a une chance de reconquérir le cœur du public », a confié Park Ji-hyun, qui joue princesse Seonhwa, avant la représentation.
D’autres troupes de théâtre composées exclusivement ou majoritairement de femmes existent aussi dans d’autres pays asiatiques, à l’image de la revue Takarazuka, au Japon, ou du Yueju, en Chine. Celles-ci continuent cependant de vivre grâce au soutien des politiques locales, contrairement au Yeoseong Gukgeuk qui a aujourd’hui disparu.
Les professionnels du secteur appellent aujourd'hui à désigner le Yeoseong Gukgeuk en tant que patrimoine culturel immatériel afin d’aider à perpétuer ses traditions et d’éviter que son succès ne se limite à celui de la série.
La représentation de
Princess Seonhwa sera disponible sur YouTube à partir du 27 décembre sur
la chaîne de l’Agence de l'héritage coréen.
km137426@korea.kr