Journalistes honoraires

14.11.2022

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Par la Journaliste Honoraire de Korea.net Danielle TARTARUGA de France

Cela fait plusieurs années que j’essaie de recueillir le témoignage de Jung-sik JUN car au-delà de son talent de dessinateur, c’est une personnalité attachante qui défend des valeurs qui me touchent ! La famille est au centre de tout son travail, tant dans la BD, dans l’écriture que dans le cinéma. Enfant adopté, sa vie est une quête et on le sent à fleur de peau, sensible et toujours dans le questionnement. Il met d’ailleurs toute cette sensibilité au service de ses créations. Sa générosité et sa sincérité touchent d’ailleurs un large public, tant en France ou en Belgique, qu’en Corée.

Il mobilise actuellement toute son énergie dans un nouveau projet de film, dont le nom nous permet dès à présent d’en comprendre l’essence même : « Tout ce qui nous relie » !

Donnons-lui la parole !!

Photo 1 : Jung-sik JUN Ⓒ Jung-sik JUN

Jung-sik JUN Ⓒ Jung-sik JUN


1/ Vous êtes Coréen et créateur de BD, installé dans le sud de la France depuis quelques années, pourriez-vous nous parler un peu de vous ?

Je suis né le 2 décembre 1965 à Séoul, en Corée du sud, et adopté à l’âge de 5 ans par une famille belge. J’ai grandi dans une fratrie de 6 enfants !

Même si ma vie a mal commencé, puisque j’ai été abandonné, je pense avoir eu une belle enfance au sein de cette famille nombreuse. Néanmoins, très tôt, je me suis posé les questions liées à mes origines, à mon abandon… C’est pour cette raison que très jeune, j’ai commencé à dessiner et raconter des histoires en BD, car j’avais un besoin presque vital d’exprimer ce que je ressentais, notamment le vide laissé par l’abandon. Le dessin est devenu ensuite mon gagne-pain, vers l’âge de 22 ans, j’ai commencé à illustrer des BD dans le magazine Spirou. Depuis toujours, je raconte des histoires en BD ou en films qui ont un lien avec mon histoire personnelle, soit à travers le filtre de la fiction, soit sous forme d’autobiographie, comme « Couleur de peau : Miel ».

J’ai vécu 3 ans en Thaïlande sur l’île de Koh Samui, où j’ai dessiné deux albums. En 2001, je me suis définitivement installé en France, d’abord à Lorient en Bretagne, puis à Bordeaux, ensuite à Paris. Je vis actuellement près de Cannes.

Photo 2 et 3 : Couverture BD et planche de « Couleur de peau : Miel » de Jung-sik JUN Ⓒ Jung-sik JUN

 Couverture BD et planche de « Couleur de peau : Miel » de Jung-sik JUN Ⓒ Jung-sik JUN


Photo 2 et 3 : Couverture BD et planche de « Couleur de peau : Miel » de Jung-sik JUN Ⓒ Jung-sik JUN

Couverture BD et planche de « Couleur de peau : Miel » de Jung-sik JUN Ⓒ Jung-sik JUN


2/ Quel a été votre parcours professionnel dans la création de BD ?

J’ai démarré en illustrant des histoires courtes dans Spirou en 1988, puis j’ai enchainé sur un nombre non négligeable d’albums de fictions aux éditions Delcourt. C’est seulement en 2006 que j’ai décidé de ne plus « tourner autour du pot » et d’aborder les sujets tels que l’identité, les racines, l’abandon, l’Asie, etc… de manière plus frontale, et non plus au travers de la fiction. C’est ainsi que j’ai commencé mon autobiographie « Couleur de peau : Miel » en BD qui a bénéficié en 2012 d’un prolongement au cinéma grâce à une adaptation que j’ai co-réalisée.

Photo 4 : Affiche du film « Couleur de peau : miel » de Jung-sik JUN Ⓒ Jung-sik JUN

Affiche du film « Couleur de peau : miel » de Jung-sik JUN Ⓒ Jung-sik JUN



3/ Avez-vous reçu des prix ? Vos BD sont-elles traduites et distribuées en Corée ?

Oui, j’en ai eu pour la BD, mais beaucoup plus pour mon film « Couleur de peau : Miel ». Notamment le prix du public et le prix Unicef au Festival International de l’Animation d’Annecy 2012, et le grand prix à la Japan Media Art Festival de 2013, etc…

Mes différentes BD « Couleur de peau : Miel », « Le voyage de Phoenix » sont sortis en Corée. « Babybox » ma dernière BD sortira ce mois-ci (novembre) en Corée.

4/ Quel est le fil conducteur dans vos créations ?

Lorsque le fil de la vie est interrompu, il faut le reconstruire. Je veux montrer à travers mon travail que malgré l'importante destruction intérieure, l'abandon ou n'importe quel autre traumatisme important, ne nous destine pas irréparablement au malheur, et que la reconstruction de soi est possible .


Photo 5 : Planche de BD de Jung-sik JUN Ⓒ Jung-sik JUN

Planche de BD de Jung-sik JUN Ⓒ Jung-sik JUN



5/ Vous avez été jury du 23ème BIAF (Bucheon International Animation Festival) en Corée, pouvez-vous nous parler un peu de cette expérience ?

Ce n’est pas la première fois que je fais partie d’un jury, mais je dois avouer que lorsqu’on me confie ce genre de responsabilité dans mon pays d’origine, j’en suis honoré et très touché. Mais ce qui m’a encore le plus touché, c’est d’avoir reçu à Bucheon le « Honorary Award » ...si j'avais 20 ans de plus je me dirais que c’est le 1er clou de mon cercueil, haha!

Blague à part, Je suis très touché par cette "distinction", d’autant qu'elle vient de mon pays natal, la Corée du sud. Pourtant, ces deniers temps, je n'ai pas été très actif dans le monde du cinéma d'animation. Je pense que ce prix récompense surtout un parcours professionnel qui n'a eu de cesse de mettre en lumière l'adoption internationale coréenne et ses conséquences. Les thèmes abordés dans mon travail tels que l’acceptation de soi, le pardon, la résilience ont touché les jurés du BIAF.

Photo 6 : Remise du prix à Jung-sik JUN Ⓒ Jung-sik JUN

Remise du prix à Jung-sik JUN Ⓒ Jung-sik JUN


6/ Je sais que vous avez un projet qui vous tient à cœur actuellement « Tout ce qui nous relie », pouvez-vous nous en parler et nous expliquer vos motivations ?

« Tout ce qui nous relie » est un projet de film documentaire sur le thème de la transmission. C’est un film sur la question de nos racines, sur notre histoire, celle de notre famille, et aussi sur celles que nos enfants se construisent. C'est un documentaire sur la construction de nos identités.

C’est aussi l’histoire d’un passage de relais d’une maman, ma compagne Laëtitia, avec son bagage d’adoptée Coréenne, à sa fille adolescente, Lilou, au moment où la construction identitaire est à son apogée, au moment charnière et délicat de la rupture avec l’enfance.

A travers cette belle histoire de transmission, c’est aussi un regard posé sur ma propre histoire.

Photos 7 et 8 : Le projet de film « Tout ce qui nous relie » de Jung-sik JUN Ⓒ Jung-sik JUN

Le projet de film « Tout ce qui nous relie » de Jung-sik JUN Ⓒ Jung-sik JUN


Photos 7 et 8 : Le projet de film « Tout ce qui nous relie » de Jung-sik JUN Ⓒ Jung-sik JUN

Le projet de film « Tout ce qui nous relie » de Jung-sik JUN Ⓒ Jung-sik JUN



7/ Comment pensez-vous financer ce projet ? avez-vous des sponsors ? Souhaitez-vous en faire un projet participatif ? (si oui, pourquoi ?)

Nous avons une co-productrice Coréenne Kim Young (Miru pictures) qui a financé le tournage en Corée. C’est un film à très petit budget, je n’ai pas jugé nécessaire de me mettre à la recherche d’un producteur Français. Depuis « Couleur de peau : Miel », une communauté s’est créée autour de mon travail, du coup j’ai pensé qu’un financement participatif sur la plateforme Ulule serait idéal.

Nous avons lancé la campagne de financement le 07 novembre, elle se terminera le 07 décembre. Nous avons exactement 30 jours pour atteindre l’objectif que nous nous sommes fixés pour terminer le film. Tout le monde peut y participer en nous soutenant ici :
https://www.ulule.com/tout-ce-qui-nous-relie/

Photo 9 : Planche pour le projet « Tout ce qui nous relie » Jung-sik JUN Ⓒ Jung-sik JUN

Planche pour le projet « Tout ce qui nous relie » Jung-sik JUN Ⓒ Jung-sik JUN



8/ Vous avez un autre projet de long métrage pour le cinéma « Single Mom », pourriez-vous nous en parler également ?

Joy, 27 ans, est une jeune mère célibataire Coréenne.

Si elle n’avait pas vu mon film « Couleur de Peau : Miel » et lu mon roman graphique éponyme, elle aurait abandonné son enfant qui serait venu grossir le nombre d’enfants coréens adoptés à l’international : plus de 200 000, depuis la guerre de Corée.

Je suis toujours très ému de réaliser que mon autobiographie a finalement sauvé un enfant de l’abandon. La boucle est bouclée, car en regardant Joy, je ne peux m’empêcher de penser à ma mère biologique.

Quand mon regard se pose sur celui de son enfant, j’ai envie de lui dire « sacré veinard ! », puis je m’imagine au même âge, quelques années avant mon départ pour l’Europe. Car contrairement à lui, aucun livre n’a réussi à me sauver de l’abandon, mis à part celui que j’ai dessiné moi-même en BD.

Joy, elle, a décidé de garder son enfant, pourtant elle paye un lourd tribut de ce choix, au quotidien, dans la vie qu’elle mène à Séoul.

Je souhaite que mon film d’animation « Single Mom » puisse avoir la même résonance que « Couleur de Peau : Miel » dans la tête de ceux qui découvriront le projet.

Je veux témoigner et prendre la parole, pour toutes ces femmes brisées par le système et pour ces enfants qui cherchent forcément toute leur vie, des réponses, une identité, une histoire.

Je rêve secrètement que ce projet de film bouscule petit à petit les mentalités.

Le projet avance, j’ai déjà un producteur Coréen très enthousiaste spécialisé dans l’animation qui est prêt à me suivre dans cette nouvelle aventure.

Un producteur Français est également très intéressé.

Affaire à suivre…

Photo 10 : Planche pour le projet « Single Mom » , dessin de Jung-sik JUN Ⓒ Jung-sik JUN

Planche pour le projet « Single Mom », dessin de Jung-sik JUN Ⓒ Jung-sik JUN


Merci Jung-sik pour cette interview et nous souhaitons un grand succès à ces deux beaux projets !

Nous espérons également que le public sera enthousiaste et vous soutiendra pleinement d’ici le 7 décembre pour que le film « Tout ce qui nous relie » puisse voir le jour !

Informations complémentaires :
Financement participatif Ulule (ainsi que le teaser et présentation du film) :
https://www.ulule.com/tout-ce-qui-nous-relie/
Lien vers la bande annonce du film déjà paru « Couleur de Peau : Miel » :
https://www.allocine.fr/film/fichefilm_gen_cfilm=190926.html



* Cet article est rédigé par un journaliste honoraire de Korea.net. Notre groupe des journalistes honoraires est partout dans le monde, pour partager sa passion de la Corée du Sud à travers Korea.net.

etoilejr@korea.kr