© Eléonore Bassop
Par la Journaliste Honoraire de Korea.net Eléonore Bassop de France, photos Eléonore Bassop
M. Lee Il-Yul, le nouveau Directeur du Centre culturel coréen à Paris a tenu une conférence le 7 décembre dernier intitulée À la recherche de la vague culturelle coréenne, brossant ainsi plus de 60 ans d’évolution de la culture sud-coréenne.
M. Lee Il-Yul a été enseignant, ça se voit à son aisance lors de sa présentation qui avait tout d’un cours magistral. Détaillée et truffée d’anecdotes, la conférence a captivé un public venu nombreux comprendre les ressorts du succès de la hallyu.
À la recherche de la vague culturelle coréenne ne peut éviter le rapprochement avec le célèbre roman de Marcel Proust À la recherche du temps perdu, une réflexion sur le temps qui passe. À la recherche de la vague culturelle coréenne est une analyse sur le développement de l’industrie culturelle en Corée du Sud et un aperçu des bouleversements du mode de vie de ce peuple passé par maintes tragédies mais qui a su trouver la force de se relever et de se réinventer.
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K-dramas et divertissement
Dans les années 1960, en Corée du Sud, les premières séries à succès étaient radiophoniques. Les taux d’écoute croissants de ces fictions diffusées sur les radios nationales ont mené à une structuration du travail des auteurs.
Avec les années 1970, l’ère de la télévision modifie la situation. Après la guerre de Corée (1950-1953), du temps de la reconstruction, on se massait chez le voisin qui possédait la seule télévision du quartier ou du village. Puis, les Coréens se sont équipés en électroménager et en télévision, les programmes TV ont pénétré les foyers et ont gagné en popularité. C’est ainsi que la série « Mademoiselle » connaît un succès retentissant sur la chaîne TBC en 1970, tout comme « Journey » sur KBS en 1972.
Les années 80/90 marque les débuts des séries à fort budget comme « Sandglass » (1995), « Eyes of Dawn » (1991). C’est aussi l’époque de l’amélioration des moyens de réalisation et de l’exportation des premières séries vers les pays d’Asie.
Dans les années 2000, les séries coréennes explosent les compteurs. La série « Winter Sonata » diffusée en 2002 sur KBS propulse les deux acteurs principaux, Bae Yong-joon et Choi Ji-woo, au rang de stars de la hallyu, la vague coréenne qui s’apprête déjà à tout emporter.
En termes de chiffre d’affaires, l’exportation des contenus audiovisuels rapporte 185 millions de dollars en 2010 et 370 millions de dollars en 2015.
La recette de ces K-dramas se caractérise par la variété de ses sujets, des rôles tenus par des idoles de la K-pop, des scénarios bien ficelés et addictifs, des horaires de diffusion adaptés au rythme de vie des téléspectateurs coréens, le soir et le matin, et depuis quelques années par une diffusion mondiale sur Netflix et YouTube.
Les K-dramas intéressent les chercheurs et des thèses sont publiées sur cette industrie télévisuelle. Elles portent sur l’identité coréenne, sur l’Asie post-coloniale, sur l’esthétisme des visages et des paysages, sur le sentiment amoureux, le Confucianisme, sur la globalisation, le nationalisme, le rapport au Japon et à la Corée du Nord. On retrouve tous ces thèmes dans les dramas coréens qui font leur singularité et leur succès dans les pays du sud-est asiatique et dorénavant un peu partout dans le monde.
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K-cinéma et industrie du divertissement
Les prémices du cinéma coréen débute sous le joug colonial japonais avec des films de résistance aujourd’hui tous perdus. Son renouveau se situe après la guerre de Corée et connaît un essor tel qu’il est l’un des rares cinémas à rivaliser avec les productions américaines sur son territoire.
Durant les années 1960, les cinéastes sont fortement influencés par le néoréalisme italien, ce cinéma de résistance à dimension sociale et politique dont les figures sont Roberto Rossellini (« Rome Ville ouverte », 1945), Vittorio de Sica (« Le voleur de bicyclette », 1948), Luchino Visconti (« Les amants diaboliques »,1943), Giuseppe de Santis (« Riz amer », 1949) et Michelangelo Antonioni (« Chronique d’un amour », 1950).
Des films comme « La servante » de Kim Ki-young (1960), « Aimless Bullet (Obaltan) » de Yu Hyun-mok (1961), « L’arche de chasteté » de Shin Sang-ok (1962), « Le Retour » (1967) de Lee Man-hee font écho à ces films italiens tant pour leur approche sociale que pour l’esthétisme de leurs images.
Dans les années 1970, la dictature de Park Chung-hee renforce la censure mais ne peut empêcher la sortie de films tels que « La Route de Sampo » (1975) de Lee Man-hee, « La Marche des imbéciles » (1975) et « The Pollen of Flowers » (1978) de Ha Kil-jong, devenus des classiques malgré leur amputation par le régime.
Le cinéma des années 1960 et 1970 introduit le star-system, il connaît une production importante, plus de 200 films par an, de nombreux spectateurs, 58 millions en 1961 vs plus 170 millions en 1969, et des rentrées d’argent substantielles. Les films s’exportent vers les pays d’Asie du Sud-Est et offre des opportunités à des acteurs de ces pays. Saviez-vous que Jackie Chan avait été cascadeur pour des productions coréennes dans les années 70 ?
La projection dans les centres culturels étrangers et dans les festivals internationaux des films coréens censurés, donne une visibilité aux réalisateurs « blacklistés ». La salle Lumière du Centre culturel français à Séoul a été le refuge de tous les cinéphiles désireux de voir autre chose que des films de propagande prescrits par les autorités militaires.
Dans les années 1990, l’arrivée des Chaebols dans l’industrie cinématographique vient dynamiser un secteur en berne. La participation de Samsung au financement du film Marriage « Story de Kim Ui-seok » (1992) vient bouleverser les codes de cette économie qui dorénavant ne cessera de croître.
Tandis que les blockbusters attirent à nouveau le public dans les salles et sur les plateformes de streaming, le Nouveau cinéma sud-coréen fait son apparition. C’est un cinéma arrimé aux sujets contemporains et sociaux qui exalte les festivals internationaux où ces films sont régulièrement distingués. le Nouveau cinéma sud-coréen est incarné par les réalisateurs Kim Ki-duk (« Printemps, été, automne, hiver… et printemps », « Samaria », « Locataires »), Park Chan-wook (« Mademoiselle », « Old Boy », « Decision to leave »), Kim Jee-woon (« Deux Sœurs », « A Bittersweet life », « Le Dernier Rempart », « Illang », « La Brigade des Loups », « Le Bon, la Brute et le Cinglé »), Bong Joon-ho (« Memories of Murder », « Mother », « Okja », « Parasite ») et quelques autres.
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Actualité et développement de l’industrie de la K-pop
Le secteur de la musique se développe pendant l’occupation japonaise qui impose sa culture avec brutalité ainsi qu’une idée japonaise de la culture occidentale.
Plus tard, l’introduction du Rock sur le territoire ira de paire avec la présence militaire américaine de l’après-guerre de Corée.
Puis, c’est la musique folk qui fait une percée dans les années 60. Dix ans plus tard, Kim Min-ki deviendra l’une des figures de proue d’une musique contestataire, revendicatrice et en résistance contre le pouvoir militaire.
Dès les années 90, les firmes coréennes de l’industrie musicale produisent des boys et des girls bands à profusion. La clef du succès de ces produits Kpop étant les nouvelles technologies de l’information avec une distribution des artistes exclusivement digitale et une promotion sur les réseaux sociaux. Cette stratégie présente l’intérêt de réaliser une diffusion à l’échelle mondiale hors du seul circuit national ou sous-régional.
Les groupes BTS et Blackpinck sont les stars de cette industrie florissante axée sur la marchandisation culturelle.
Une nouvelle page de la K-pop est en train de s’écrire grâce à des groupes comme Leenalchi qui mixe musique pop et chants Pansori.
Toutefois, une tendance est à observer dans l’industrie musicale, celle du retour du disque vinyle. Cet obscur objet du désir électrise les collectionneurs. Il en va ainsi de la première édition du disque vinyle « Fire Tree » de Bang Eui-Kyung sorti en 1972 ou de l’album « Thriller » de Michael Jackson réédité en 2022 en vinyle pour son 40e anniversaire, le plaçant à nouveau en tête du Billboard américain, 13 ans après la disparition de l’artiste.
En conclusion
Le phénomène Hallyu attire l’attention sur la Corée du Sud.
Le tourisme vers le pays du matin calme bat son plein et d’autres aspects de la culture coréenne sont mis en exergue comme le hangeul (l’alphabet coréen), le hansik (la gastronomie), le hanbok (le costume traditionnel), les hanok (les maisons traditionnelles), le hanji (le papier traditionnel), ou encore la musique traditionnelle.
Les centres culturels coréens et les Instituts Sejong implantés un peu partout dans le monde participent à la diffusion de cette culture millénaire et celle toute jeune de la vague hallyu.
* Cet article est rédigé par un journaliste honoraire de Korea.net. Notre groupe des journalistes honoraires est partout dans le monde, pour partager sa passion de la Corée du Sud à travers Korea.net.
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