Par la journaliste honoraire de Korea.net Laurène Cermal de France


L’histoire n’est pas très connue, et pourtant elle représente le commencement de l’amitié franco-coréenne.

Cela se passe il y a 172 ans, en avril 1851, avant la signature du traité d’amitié et de commerce entre les deux pays. Le baleinier français Le Narval, avec à son bord une vingtaine de personnes, a fait naufrage sur l'île de Bigeum. Le premier consul français de Shanghai de l'époque, Charles de Montigny, s'était rendu sur place pour secourir les marins. Il les a retrouvés sains et saufs, secourus par les autorités coréennes et soignés par les habitants de l'île de Bigeum.

Le 2 mai, à la veille de leur retour en France, Charles de Montigny a voulu montrer sa gratitude envers le gouvernement de Joseon en organisant un dîner avec Lee Jeong-hyun, le pasteur de la ville de Naju, située près de l'île de Bigeum, au sud-ouest de la péninsule coréenne. Le consul de Montigny partagea du champagne et du vin et le pasteur de Naju de l'alcool traditionnel coréen (sûrement du makgeolli au vu du témoignage consigné par le consul Montigny). De nombreux marins ont pu aussi déguster ce dîner. Dans un rapport envoyé à l'empereur français Napoléon III, le consul Montigny a consigné en détail la scène de la fête d'adieu sur l'île de Bigeum, qu’il décrit comme étant « l'île de l'Oiseau Volant », permettant ainsi de garder en mémoire cette journée.

Ce soutien et cette solidarité furent le départ de la grande amitié encore aujourd’hui présente entre la Corée et la France.


Le 21 août dernier a eu lieu un forum à la mairie de Naju autour du naufrage du baleinier français.

Lors de ce forum, le professeur Pierre-Emmanuel Roux, de l'université Paris Cité, a fait une communication sur une étude historique de la première rencontre entre la Corée et la France. Il a beaucoup étudié l’incident de l'île de Bigeum et a notamment publié « Les premiers contacts franco-coréens au XIXe siècle : un sujet toujours d’actualité » ainsi que « La rencontre entre le christianisme et le confucianisme en Corée » et « À la rescousse des naufragés de l’île de Bigeum (avril-mai 1851) ».

Les moyens de renforcer les échanges culturels entre les deux pays ont également été discutés en présence des experts lors de ce forum.

La ville de Naju a présenté une stèle dédiée au pasteur Lee, qui était préservée à l'intérieur de la mairie, et a reconstitué la gourde utilisée lors du dîner entre Montigny et Lee.

« Les efforts de Naju pour mettre en lumière cet épisode historique, il y a 172 ans, qui a changé l'histoire diplomatique entre la Corée et la France, deviendront la pierre angulaire de l'amitié et des échanges entre les deux pays », a déclaré le maire de Naju, Yoon Byung-tae.


Le naufrage du Narval sur l'île de Bigeum a marqué l’histoire franco-coréenne et leur relation bilatérale, qui est d’autant plus forte aujourd’hui.

C’est pour cela que le comté de Shinan, dans le Jeolla du Sud, a annoncé que divers projets seraient menés pour marquer le 140e anniversaire des relations diplomatiques entre la Corée et la France en 2026. Tout d'abord, un parc commémoratif sera créé sur l'île de Bigeum, où les marins français ont échoué et ont été secourus. Des installations désaffectées seront rénovées pour créer un musée dédié au champagne et au makgeolli.

Une relation de fraternité avec Toulouse, la ville natale du consul de Montigny, sera établie et un village français sera créé pour développer l'infrastructure touristique, suivant l'ouverture du pont entre les îles de Bigeum et Chupo prévue pour 2030. Il est aussi prévu de promouvoir la recherche sur les archives de Bibyunsa. Parallèlement, un nouvel espace intitulé « l'histoire de la dérive à Shinan » sera créé au musée d'histoire des échanges de la mer Jaune, qui devrait être achevé en 2024, afin de susciter l'intérêt des visiteurs et d'être utilisé comme matériel pédagogique.

Certaines histoires ou relations peuvent partir de rien, d’un geste donné, mais peuvent marquer et rester à tout jamais, comme la relation entre la France et la Corée.


* Cet article a été rédigé par une journaliste honoraire de Korea.net. Présents partout à travers le monde, nos journalistes honoraires partagent leur passion de la Corée du Sud à travers Korea.net.

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