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12.10.2023

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Par la journaliste honoraire de Korea.net Éléonore Bassop de France


Affiche de « Song of the Bandits ». © Netflix Korea

Affiche de « Song of the Bandits ». © Netflix Korea


Et si nous parlions de ce drama incroyable qui fait sensation sur Netflix ? Song of the Bandits !

Cette série d’action qui nous entraine dans un voyage à travers le temps retrace un pan douloureux de l’histoire coréenne, celle de l’annexion de la péninsule par l’empire du Japon.

Dès le début, le contexte historique est posé : 1905, traité de protectorat Corée - Japon, création de l’armée vertueuse, fuite des soldats coréens en Mandchourie, et en Yeonhaeju, région située au sud-est de la Russie. Puis, nous voilà catapultés en 1915, en pleine propagande pro-japonaise... Action !

J’étais très curieuse de voir Song of the Bandits, mon premier western coréen, moi qui ai regardé tant de westerns américains ! Bien sûr, j’avais entendu parler du film de Kim Jee-woon, le Bon, la Brute et le Cinglé (2008), dont l’action se situe aussi en Mandchourie, sans l’avoir jamais vu.

Tous les codes sont réunis pour faire de Song of the Bandits un western classique. Les Tuniques bleues représentées par les Japonais, les Hors-la-Loi sont les bandits Mandchous, et les natifs de Joseon sont les Indiens malmenés, pourchassés, mis en esclavage ou tout simplement lynchés.

Dans ce Far West sino-joseonien, les hommes arborent le Stetson, le fameux chapeau de l’Ouest américain, et des cache-poussières, tandis que les femmes s’exhibent en crinolines et capelines. Les autres personnages sont vêtus plus traditionnellement, ce qui m’a fait penser à Soleil Rouge (1971), le western de Terence Young avec Toshirō Mifune, Alain Delon et Charles Bronson, dans lequel Orient et Occident se confrontent.

Extraits de « Song of the Bandits ». © Netflix Korea

Extraits de « Song of the Bandits ». © Netflix Korea


Et que dire des paysages ? Certains me rappellent le Monument Valley des films de John Ford. Ajoutez à cela des chevaux, des diligences, des tempêtes de sables, des bivouacs, des tavernes aux portes battantes où l’on joue aux cartes et boit ce qui semble être du whisky. Un autre point commun avec les westerns américains, c’est le chemin de fer, autrement appelé le cheval de fer comme dans les bandes dessinées de Blueberry, avec des locomotives crachant d’épaisses fumées noires, charbon oblige !

Certaines scènes sont des hommages flagrants aux films du genre, je pense à La Horde sauvage (1969) de Sam Peckinpah ou Mon nom est Personne (1973) de Sergio Leone.

L’esthétisme de la série est bien défini, une palette de couleurs avec une dominante de bruns, et de temps à autre une touche de couleur vive tranche avec le reste : le rouge d’une robe, le rouge des corps sanguinolents, le rouge des casquettes de l’uniforme japonais, le rouge du drapeau nippon.

La violence est partout et parfois les scènes sont insoutenables. Mais ce qui a retenu mon attention, ce sont les dépouilles des indépendantistes pendus aux arbres, me renvoyant à d’autres images et à une autre histoire. J’entends Billie Holiday chanter Strange Fruit de sa voix rocailleuse, j’entends son cri de désespoir pour dénoncer ces « fruits étranges suspendus aux peupliers » un peu partout dans les États du Sud américain pendant les lois Jim Crow.

D’autres scènes m’ont fait sourire, notamment la vision toute japonaise du monde occidental, avec ces grandes réceptions données dans de luxueuses demeures au parquet ciré et aux lustres éblouissants. Les femmes sont en crinolines parées de bijoux étincelants, et les hommes, plus austères, sont en queue de pie ou en uniforme. On les voit s’essayer maladroitement à la valse sur un air de Tchaïkovski. C'est à la fois charmant et déconcertant !

Mais l’intention des auteurs de la série est ailleurs. C’est montrer la lutte héroïque des combattants de la Liberté que sont ces Coréens qui ont formé les bataillons de l’armée vertueuse, cette armée qui s’est levée à chaque fois que la nation coréenne a été en danger, que ce soit pendant la guerre d’Imjin (1592 et 1598) ou pendant la colonisation japonaise.

Armée vertueuse de Gwangju, vers 1900, Musée national de Gwangju

Armée vertueuse de Gwangju, vers 1900, musée national de Gwangju. © Eléonore Bassop


L’histoire de Yoon Lee, de Choi Choong-soo, de Kang San-gun, de Choraeng-yi, de Geumsu mais aussi de Nam Hee-shin, et même de Eon Nyeon, la Calamity Jane qui manie armes à feu et arts martiaux pour régler ses comptes, c’est l’histoire de leur survie dans le Gando, cette terre chinoise, économiquement japonaise, peuplée des ressortissants de Joseon. C’est l’histoire de leur résistance à la domination japonaise pour la libération de leur pays.

Songs of the Bandits n’a pas grand-chose à voir avec Rio Grande de John Ford ou Les Aventures du capitaine Wyatt de Raoul Walsh, la série est plutôt à rapprocher du western Buck et son Complice (1972), réalisé par Sidney Poitier. Ici aussi, on suit un héros, un ancien de l’armée, fuyant l’esclavage, en quête d’une terre promise pour lui et les siens afin d’y vivre en paix et en homme libre, après avoir affronté tous les méchants.

Songs of the Bandits, c’est tout cela, c’est une aventure épique à ne pas manquer !


* Cet article a été rédigé par une journaliste honoraire de Korea.net. Présents partout à travers le monde, nos journalistes honoraires partagent leur passion de la Corée du Sud à travers Korea.net.

caudouin@korea.kr