« Je ne connaissais pas ce groupe (j’ai plus de 40 ans), mais j’ai dansé sur leur chanson. » Commentaire posté sous le JT de Télénantes
Les 15 et 16 novembre 2025, Nantes a vibré au son d’une vague coréenne inattendue...
Un concert comme révélateur
À l’affiche du festival Art to Play, rendez-vous incontournable des cultures pop et de l’imaginaire, le groupe coréen Trendz a littéralement conquis le public. Deux concerts exceptionnels, des dédicaces, une file d’attente interminable pour les rencontrer, des apparitions dans la presse locale et à la télévision (dont le JT de Télénantes), des cris, des larmes et beaucoup de sourires. Leur venue a marqué un tournant. Non seulement pour les fans, mais aussi pour tous ceux qui les ont découverts ce week-end-là, pour certains sur scène, pour d’autres parfois par hasard, parfois avec des a priori.
Je connaissais le groupe, notamment pour l’avoir vu en concert à Paris en juin dernier. Puis dans le cadre de ma toute nouvelle chaîne YouTube, Chingu Lab, j’avais eu la chance de les interviewer en amont pour un épisode de mon émission Ppali Talk, un format express qui capte la personnalité spontanée des artistes coréens, avec une touche de culture française. Leur énergie, leur humour et leur attention aux détails m’avaient déjà frappée.
Lors de la conférence de presse, j’ai voulu aller plus loin en leur posant une question toute simple en apparence : comment trouve-t-on sa voix individuelle quand on fait partie d’un groupe de sept ?
Les réponses ont révélé un processus aussi structuré qu’introspectif. L’un des membres s’est récemment replongé avec intensité dans la danse. Un autre, passionné de hip-hop, crée des chorégraphies sur mesure. Un troisième cherche à mieux mêler rap, chant et performance. Tous, à leur manière, nourrissent leur expression artistique à partir d’observations du monde, qu’il s’agisse d’anime, de jeux ou de musiques croisées sur Internet.
Si chaque morceau est discuté collectivement, chaque membre travaille sa propre partie en amont, puis ils se réunissent pour échanger des retours, affiner les interprétations et faire de la chanson une œuvre à la fois cohérente et multiple.
Une forme de démocratie créative, au sein d’un groupe qui porte bien son nom. Ces réponses ont dessiné les contours d’un phénomène plus vaste. La K-pop, souvent perçue comme un moule rigide, devient un espace d’apprentissage de soi dans le collectif. Être soi, sans effacer l’autre.
Une effervescence locale aux couleurs coréennes
Trendz n’était pas simplement programmé comme une attraction musicale. Ils étaient au cœur du dispositif. Dès leur arrivée, l’ambiance a changé. Dans les files du festival, on croisait des fans de tous âges, hommes et femmes, fébriles, des parents intrigués, des adultes seuls venus « voir ce que c’était, la K-pop ». Deux concerts, donnés dans une grande salle de spectacles attenante à l’événement, ont rassemblé près de 6 000 spectateurs en cumulé. Les cris étaient assourdissants, mais jamais gratuits. La performance les justifiait, puissance scénique, précision chorégraphique, émotions partagées.
Entre les performances, Trendz n’a pas quitté le terrain. Dès le samedi matin, ils ont enchaîné conférence de presse, séances de dédicaces prolongées, participation en jury à une compétition de danse, et première performance d’une heure devant un public conquis. Le dimanche, de nouveau interview, deuxième concert, nouveaux fans à rencontrer. Ils se sont même prêtés au jeu de la K-pop Random Battle, un moment festif où les fans doivent reconnaître les morceaux au hasard et exécuter immédiatement la chorégraphie correspondante.
Cet emploi du temps serré n’a jamais entamé leur énergie ni leur bienveillance. À chaque apparition, ils se sont montrés ouverts, chaleureux, réceptifs, proches, spontanés, dans l’échange. Loin de l’image distante ou robotisée que certains associent encore à la K-pop, Trendz a montré un visage profondément humain, accessible et lumineux. Et le public l’a ressenti. Sur la page Facebook de Télénantes, les commentaires affluent :
« Je ne comprenais pas la folie de la K-pop chez ma fille, mais ce groupe, franchement sympa. C’était génial. »
« J’y étais dans la fosse. Mon dieu, ça criait de partout. Super groupe en tout cas. »
« J’ai plus de 40 ans et je ne connaissais pas ce groupe… mais j’ai dansé sur leur chanson ! »
Trendz, comme leur nom l’indique, se revendique de leur génération, la Z. Celle qui veut casser les codes tout en restant connectée. Celle qui cherche sa voix sans renier l’harmonie du groupe. Lors de notre échange à la conférence de presse, je leur ai posé une question simple en apparence : comment trouve-t-on sa voix individuelle quand on fait partie d’un groupe de sept ?
Sept personnalités, sept rythmes, sept visions. Il y a des frictions, des désaccords, parfois des egos qui s’entrechoquent. Mais chez Trendz, ces tensions deviennent moteur. Le respect mutuel, l’écoute, la volonté de ne pas perdre l’autre en chemin : voilà ce qui structure leur dynamique de groupe.
Au fil de nos échanges, une autre question plus large s’est imposée. À leurs yeux, qu’est-ce que la génération Z coréenne cherche à exprimer aujourd’hui ?
Yoonwoo, l’un des membres a répondu sans détour. En Corée, la pression scolaire commence très tôt. Dès le primaire, les enfants sont submergés par les attentes : exceller, intégrer les meilleurs établissements, construire un avenir sûr. Le rythme est effréné, sans respiration. Au milieu de cette course, beaucoup de jeunes ne cherchent qu’une chose : un peu de répit.
« Ce que les jeunes veulent aujourd’hui, c’est juste un peu de bonheur simple dans la vie de tous les jours », a-t-il confié.
Cette réponse en dit long sur leur époque. La musique, et la K-pop en particulier, devient alors un espace de respiration... Une manière de souffler, d’éprouver de la joie, d’échanger. Peut-être est-ce là, justement, que Trendz vient offrir une musique sincère, faite pour connecter.
Cette philosophie se reflète dans plusieurs de leurs textes récents, où percent des thèmes comme le dépassement de soi, la volonté d’exister pleinement et l’affirmation individuelle. Si RPZ affirme haut et fort une détermination à tracer sa propre route, « Challenger, c’est mon rêve / Je protège mes convictions », Crime ouvre une parenthèse plus charnelle, entre tension et séduction. Pensée comme une déclaration aux fans, la chanson assume un autre type de liberté, plus instinctive. Sans tomber dans la provocation gratuite, leurs chansons esquissent une trajectoire : celle d’un groupe qui cherche à tracer sa propre voie, sans renier ses influences ni se fondre dans un moule.
Une performance qui se regarde autant qu’elle s’écoute
Sur scène, Trendz impressionne. Chorégraphies millimétrées, énergie physique, gestuelle soignée. On pense à Ateez, à Enhypen, à ces groupes où la musique s’incarne, se projette, se vit. Plusieurs spectateurs ont confié que leur rapport à la K-pop avait changé après les avoir vus en vrai. Et pas seulement des jeunes. Leurs performances ne séduisent pas uniquement les connaisseurs, elles happent aussi les curieux, les amateurs de spectacle vivant, ceux qui aiment quand la musique entre en résonance avec le corps.
Mais ce week-end, au-delà de la technique, c’est autre chose qui a marqué. Leur joie. Leur complicité. Quelque chose de lumineux qui circulait entre eux sur scène. Leur proximité sautait aux yeux. Des regards, des rires, des gestes spontanés vers le public. C’est peut-être ça, leur vrai charme. Ce mélange unique entre exigence scénique et naturel désarmant.
Avec Crime, leur tout dernier single, le groupe explore un tout autre registre : une ambiance plus sensuelle et assumée, pensée comme une déclaration de charme aux fans. Une parenthèse séduisante dans une discographie habituellement plus sombre.
Transmettre sans imposer : la culture coréenne en partage
Trendz n’a pas « représenté » la Corée. Ils l’ont incarnée, naturellement. Leur musique, leur façon d’être, leur approche de la scène, tout portait en filigrane une part de leur culture. Mais jamais de manière appuyée. La rencontre s’est faite sur un autre terrain, celui du lien humain, du plaisir partagé, de la curiosité mutuelle.
Le festival Art to Play a ainsi montré comment la culture coréenne peut s’inscrire, sans forcer, dans le paysage culturel français. Et pas uniquement à Paris. À Nantes, ville portuaire ouverte sur le monde, cette alchimie a opéré avec une force inattendue. Le succès de Trendz ne tient pas seulement à leur talent, il tient aussi à ce que leur présence dit de notre époque.
Une génération qui relie
Dans une société où les repères collectifs se fragmentent, voir un groupe comme Trendz fédérer des publics si divers est un signe. Le signe qu’il existe encore des formes artistiques capables de faire lien. Et que la K-pop, loin d’être un phénomène de niche ou une mode passagère, peut devenir un espace d’expression personnelle, de dialogue intergénérationnel et de reconnaissance mutuelle.
C’est cela que j’ai vu à Nantes : des artistes sincères, un public en éveil, et cette sensation rare qu’il se passait quelque chose. Quelque chose qui ne tient pas seulement à la musique. Mais à la façon d’être au monde.
Ce week-end-là, à Nantes, même ceux qui ne connaissaient pas Trendz ont dansé.
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