Journalistes honoraires

26.11.2025

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Par Nicole Bergeaud

J’ai eu un véritable coup de cœur pour Gyeongju il y a trois ans, au point d’avoir envie d’y retourner cette année. Cette fois, j’en ai profité pour découvrir la superbe exposition « Silla Gold Crowns: Power and Prestige » au musée national de la ville. Inaugurée à l’occasion du sommet de la Coopération économique Asie-Pacifique (APEC), elle est entièrement gratuite, tout comme le musée. En revanche, mieux vaut arriver tôt car les Coréens s’y pressent en nombre, fiers de leur patrimoine, et les entrées sont volontairement limitées pour garantir une expérience optimale.

Déterminée, arrivée à l'aube, j’ai patienté une heure avant d’obtenir mon sésame ! Visiter l’exposition a été pour moi une occasion unique de contempler de près ces chefs-d’œuvre d’orfèvrerie, qui comptent parmi les trésors les plus emblématiques du patrimoine coréen. J’ai adoré la scénographie, spacieuse, claire et ludique. Elle met parfaitement en valeur ces trésors millénaires inestimables.

10 novembre 2025. © Musée national de Gyeongju et Nicole Bergeaud

Au musée national de Gyeongju, le 10 novembre 2025. © Musée national de Gyeongju et Nicole Bergeaud


À l’époque des Trois Royaumes, Silla était surnommé « le pays de l’or »

Les émissaires chinois le mentionnaient ainsi dès le Ve siècle. Le royaume possédait en effet d’importantes ressources naturelles, mais aussi une véritable culture de l’or dont le rôle symbolique était central dans l’affirmation du pouvoir politique. La quantité et la qualité des objets en or retrouvés dans ses tombes royales depuis un siècle sont extraordinaires.

À Gyeongju, on compte plus de 200 tumuli royaux, dont environ 150 dans le centre-ville. Seule une partie a fait l’objet de fouilles systématiques : par exemple, dans le parc de Daereungwon que j’ai visité, certaines tombes ont été entièrement excavées, tandis que d’autres sont laissées volontairement intactes.

Les six couronnes de Silla. © Musée national de Gyeongju

Les six couronnes de Silla. © Musée national de Gyeongju


Les six couronnes réunies : un événement exceptionnel et une longue histoire

L’exposition est construite autour des six couronnes royales retrouvées depuis 1921 qui, par leur sophistication technique et richesse symbolique, témoignent du raffinement atteint par Silla. Exceptionnellement réunies pour l’occasion, elles viennent de plusieurs musées coréens et datent toutes du Ve et du début du VIe siècle, avant que le royaume n’adopte massivement l’influence bouddhique.

En 382 de notre ère, le roi adopta le titre de Maripgan (souverain suprême) et choisit l’or, matériau réservé à l’élite, pour affirmer son autorité divine et politique. C’est ainsi qu’apparut la couronne d’or, réservée exclusivement à la famille royale. Bien plus que de simples objets précieux, elles étaient le symbole vivant du pouvoir, exprimant à la fois le rôle cosmique du roi et sa connexion avec les esprits.

Les funérailles royales étaient grandioses: on érigeait d’énormes tumuli, le défunt était paré d’or et d’innombrables trésors accompagnaient le corps. Bien que leur usage de l'or et la pratique du chamanisme soient liés aux cultures des steppes du nord, la royauté de Silla adopta les coutumes funéraires de la Chine en enterrant leur élite dans des tombes en monticule.

Les tombes royales de Silla contiennent presque toujours, en plus de la couronne, une ceinture d’or richement décorée. J’ai pu en admirer plusieurs dans l’exposition. Elles sont dans un état de conservation remarquable. Ornées de pendentifs miniatures : outils, fioles médicinales, pierres de jade, poissons ou dragons, elles sont magnifiques. Couronne et ceinture étaient les insignes du pouvoir suprême. Dans certaines tombes dépourvues de couronne, la seule présence de la ceinture a suffit pour identifier un défunt royal.

La symbolique des couronnes est très intéressante et magnifiquement mise en valeur. © Nicole Bergeaud

La symbolique des couronnes est très intéressante et magnifiquement mise en valeur. © Nicole Bergeaud


- Les motifs d’arbres : reliant le ciel et la terre, ces motifs stylisés représentent l’arbre sacré, un thème central des traditions chamaniques. Véritable « axe du monde », il relie le ciel, la terre et le monde souterrain. En le portant, le roi affirmait son rôle de médiateur entre ces mondes.

- Les ramures de cerf : un animal considéré comme un passeur entre les mondes, représentant vitalité et pouvoir chamanique.

- Les jades : ces magnifiques pendentifs appelés « gogok » en forme de virgule représentent des pousses, des germes ou des formes embryonnaires, symboles de fécondité et de prospérité. Or, il n’existe aucun gisement de jade connu dans la péninsule coréenne. Les analyses montrent qu'elles viennent très probablement du Japon (de la région d’Itogawa/Niigata, célèbre pour ses gisements anciens. Ces perles en forme de virgule illustrent les liens commerciaux et culturels entre Silla et le Japon antique, même en l’absence de traces écrites.

- Les pendentifs mobiles : les nombreuses chaînettes ornées de plaques d’or créent un effet scintillant et sonore évoquant la circulation de l’énergie vitale et rappelant les objets protecteurs utilisés dans les rituels chamaniques, symboles de lumière, énergie et protection.

- L’usage exclusif de l’or, travaillé avec une finesse remarquable par les artisans de Silla, symbolise lui, la lumière solaire, l’éclat du pouvoir et la pureté rituelle.

L’or de Silla, composition et origine : j’ai trouvé cette partie très intéressante et bien documentée. On y explique que les couronnes ne sont pas en or pur : l’or seul étant trop mou, il était allié à l’argent et parfois au bronze. Les couronnes les plus anciennes (comme Gyo-dong) sont les plus pures : environ 21 carats. Les plus récentes contiennent davantage d’argent : environ 19 carats, car avec l’évolution du style et l’accumulation des ornements, elles étaient plus grandes et plus lourdes. Certains pensent qu’il y avait de mines d’or autour de Gyeongju, mais rien ne le prouve.

Collections permanentes du nusée mational de Gyeongju. © Nicole Bergeaud

Collections permanentes du musée mational de Gyeongju. © Nicole Bergeaud


Je ne suis pas partie sans découvrir les collections permanentes du musée. On y voit des objets précieux issus d’échanges lointains trouvés dans les grandes tombes de la période Maripgan. Ils proviennent de Goguryeo, Baekje, de Chine et de Wa (Japon), mais aussi de l’Occident lointain comme la vaisselle en verre aujourd’hui présumés romains ou sassanides... Cela s’explique lorsque l’on sait que Silla reçut l’aide de Goguryeo pour repousser les autres royaumes (Baekje et Gaya) et le Japon. De nombreux biens importés venaient par le nord depuis Goguryeo, depuis la route de la Soie. De plus, et bien que le royaume dût situé au sud-est de la péninsule, il entretenait aussi des échanges commerciaux et diplomatiques avec des pays lointains, par la route maritime.

J’ai visité l’exposition le 10 novembre 2025. Depuis et vu son succès, elle a été prolongée jusqu’au 22 février 2026. De nouvelles modalités de réservation ont été mises en place avec une jauge à 150 personnes par session et une réservation possible en ligne chaque lundi à 10h pour la semaine suivante. À vérifier sur le site du musée.



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