Par Lee Jihae

Aventurière et randonneuse aguerrie, Kim Youngmi est entrée dans l’histoire en devenant la première femme asiatique à traverser l’Antarctique en solitaire. Son périple, qui a duré 69 jours, 8 heures et 31 minutes, a de quoi inspirer les plus grands marcheurs, car seules quatre personnes ont déjà traversé le continent le plus désert et le plus froid du monde à la force de leurs deux jambes.


Korea.net : Comment vous êtes-vous alimentée ?

Kim Youngmi : Avant de partir, j'ai fixé avec l’aide d’un nutritionniste mon régime alimentaire à 840 grammes de protéines et 3 800 calories par jour. Mais ces valeurs restent insuffisantes, considérant le fait que 6 000 à 7 000 calories par jour sont nécessaires pour un tel effort. Je me suis nourrie de viande de bœuf séchée, de plats préparés et de riz déshydraté. Dans un tel contexte, peu importe le goût, l’important est d’être rassasiée.

Géographiquement parlant, l’Antarctique est un désert du fait de son volume faible de précipitations. Comment avez-vous fait pour boire suffisamment ?

J’ai bu de la neige fondue ! Dense et riche, l’eau de la neige antarctique est abondante et seul 0,2 litre de carburant est nécessaire pour en faire fondre cinq litres. Pas de préoccupations particulières de ce côté-là.

Et pour les déchets ?

Je suis partie aussi légère que possible, car rien ne doit être laissé sur place. Mon périple a débuté avec 100 kilos, qui ont diminué au fur et à mesure que j’avançais. J’avais prévu deux GPS et deux réchauds au cas où l’un tomberait en panne.


Parlez-nous de votre expérience du froid.

En plus d’être sec et glacial, l’Antarctique est également extrêmement venteux, et donc dangereux. Il fallait absolument que je veille à ce que ma tente ne s’envole pas. Lors des tempêtes, j’identifiais sa direction avant de construire un mur de neige d’environ un mètre de haut pour la protéger. Il y a une fois où j’ai dû y passer la journée tellement le blizzard était violent. Même sans le vent, les températures moyennes en Antarctique oscillent entre -15 et -35 degrés (en été), soit encore plus froid qu’un congélateur. Mais avec les bagages à tirer derrière moi, je n’avais pas froid. Je transpirais même ! Heureusement, il ne faut pas longtemps pour se sécher. Une fois rentrée dans ma tente et ma veste retirée, la sueur pouvait se transformer en glace.

Comment y avez-vous fait face ?

Il fallait à tout prix éviter d’exposer ma peau. Gants et plusieurs couches de vêtements sont ainsi indispensables, tout comme les deux paires de lunettes et le masque que j’utilisais pour couvrir mon visage. Emmitouflée comme j'étais, difficile de consulter l’heure, alors j’utilisais la musique pour me repérer chronologiquement. Ce sont les chansons qui rythmaient mes pauses, aussi.

Comment se protéger du soleil ?

Novembre, décembre et janvier sont les jours d’été austral, alors la nuit n’est jamais tombée ! Avec le reflet ininterrompu du soleil sur le sol blanc, les lunettes de soleil sont indispensables, tout comme un cache-œil pour le sommeil. Depuis le pôle Sud vers le glacier Leverett, j’avais constamment le soleil en face de moi.


Qu'est-ce que cette expérience vous a apportée ?

De réaliser que le pôle Sud tient bien sa réputation d’endroit le plus glacial de la Terre ! Mais aussi et avant tout, qu’une grande préparation et de nombreux efforts sont nécessaires afin que ce continent soit exploré, et surtout compris.


jihlee08@korea.kr