Eum Soon-Ok au Salon d'automne en janvier 2024. © Kang Hana
Par la journaliste honoraire de Korea.net Nathalie Fisz de France
En janvier dernier, mon amie Kang Hana, qui est journaliste de métier, m’a envoyé un message sur Instagram qui disait : « si tu es disponible, on t’invite à l’exposition de ma maman au Salon d’automne à la Villette ».
Par le passé, sa maman avait exposé au Carrousel du Louvre, et je n’avais pas pu m’y rendre.
Alors, le dimanche 21 janvier, je suis partie à la Grande Halle de la Villette pour voir Hana, qui était restée un long moment en Corée, et faire enfin la connaissance de sa maman, l’artiste Eum Soon-Ok. Ce fut l'occasion pour moi de discuter avec cette artiste des couleurs et des rochers et d'aller à la rencontre d’autres artistes, comme Agathe Jung, une amie d’Eum Soon-Ok.
Malgré la pluie qui tombait bruyamment sur les structures de la Grande Halle, j’étais éblouie par toutes les créations artistiques du salon.
À ce moment-là, je ne savais pas encore que j’allais revoir Eum Soon-Ok, mais cette fois dans son jardin. Partons à sa rencontre.
« Harmonie de la Nature », par Eum Soon-Ok, au Salon d'Automne. © Compte Instagram d'Eum Soon-Ok
Eum Soon-Ok : une ode à la nature et à la peinture
Association d’artistes sans but lucratif, le Salon d’Automne encourage le développement des beaux-arts en France et à l’étranger. Chaque année a lieu une grande exposition où sont présentées des centaines d’œuvres d’art de toutes disciplines. L’association d’artistes a pour valeurs premières la solidarité et la fraternité. Une délégation de seize artistes ukrainiens était présente au salon cette année.
La marraine de l’édition 2024, la 120e, du 18 au 21 janvier 2024, était la célèbre Lady Ratna Sari Dewi Sukarno, femme d’affaires qui fut elle-même étudiante en arts et épouse du défunt Sukarno, premier président de la République d'Indonésie.
Eum Soon-Ok présentait son tableau « Harmonie de la nature » dans la catégorie Abstractions. Il a trouvé son acquéreur.
Eum Soon-Ok, peintre des rochers. © Nathalie Fisz
D’autres expositions avant le Salon d’automne
Eum Soon-Ok a déjà exposé ses créations dans le passé. Voici quelques exemples.
En 2010, 2011, 2013 et 2016, elle expose avec l’association de femmes coréennes AFCF Kowin à la Galerie 89, au Carrousel du Louvre, à l’Ever Art Galerie. En 2011, 2012, 2014 et 2015, elle participe au salon Art en Capital au Grand Palais. En 2016, elle expose au salon des Arts de Montesson (78) et à la Galerie Pine de Séoul. De 2017 à 2019, elle fait ses expositions en solo au Carrousel du Louvre.
Eum soon-Ok a préfacé l’un de ses catalogues d’exposition, dont elle m’a gentiment fait cadeau. Elle a expliqué son lien fusionnel avec la nature et a noté que « l’expérience et le souvenir de la première enfance sont le trésor de l’imagination, la montagne, la mer, etc. Tous les éléments qui constituent la nature renaissent en œuvres de ces premières directes expériences de la jeunesse. L’expérience de germe de la nature est une source de mon incessante inspiration pour mes œuvres, en particulier dans cette civilisation moderne et qui casse l’harmonie avec la nature. Le voyage envers la nature elle-même fertilise et pacifie l’âme déserte et il donne le vrai repos ».
Dans un autre catalogue d’exposition qu’Eum Soon-Ok m’a également donné, il est écrit que « la nostalgie chez l’artiste devient un art. Eum Soon-Ok est comme cette petite fille qui court dans les champs avec les bras grands ouverts vers le ciel et n’a jamais oublié les paysages de sa ville natale Naju qui nourrissent son imagination ».
Hana m’a dit au Salon d’Automne et dans les jours qui ont suivi : « Si tu veux voir d’autres tableaux de ma maman, tu peux passer chez elle, à Villejuif. On pourrait manger ensemble. Cela nous ferait plaisir ». Alors je lui ai répondu : « Bien sûr, je pourrais même écrire un article sur ta maman ! »
L’invitation a été fixée au samedi 17 février.
Bouquet par Eum Soon-Ok. © Nathalie Fisz
Rencontre avec Eum Soon-Ok
Nathalie Fisz : Quand êtes-vous arrivée en France ?
Eum Soon-Ok : Je suis arrivée en France en avril 2020.
Depuis votre arrivée, avez-vous toujours habité en région parisienne ? Quelles régions de France aimeriez-vous visiter ?
J’ai toujours habité en région parisienne. Tout d’abord j’ai vécu au Plessis-Robinson, puis à présent à Villejuif dans cette maison avec jardin. J’aime beaucoup la Normandie, et je suis allée à Honfleur et au Mont-Saint-Michel. Ces villes m’inspirent beaucoup. J’aimerais aussi visiter Nice.
Depuis quand exercez-vous une activité artistique ? Où avez-vous appris votre art ?
J’ai appris en Corée avec d’autres artistes. J’ai également enseigné la poterie et fait beaucoup de moulage. J’ai fait également de la menuiserie dans un institut privé et peux créer des meubles.
Rocher bleu du parc Wolchulsan. © Nathalie Fisz
Quels sont les thèmes et les sujets que vous aimez peindre ?
J’ai toujours aimé la nature et ses paysages. J’aime beaucoup peindre les rochers et leurs couleurs. Je prends des photos de paysages, puis à partir de celles-ci, je peins. En Corée, je suis toujours inspirée par ma ville natale Naju, ville du Jeolla du Sud où je retourne régulièrement (en caractères chinois, Naju signifie « ville de soie »). J’aime peindre les couleurs de la montagne, notamment celles du parc national du mont Wolchulsan (qui signifie « la lune élève la montagne »). C'est un magnifique parc situé près de Naju, dans les comtés de Gangjin et de Yeongam.
Quels sont les matériaux que vous utilisez pour votre peinture ?
J’utilise la peinture acrylique et l’huile.
Avez-vous des contacts avec des artistes coréens en France et avec des artistes français ?
J’ai beaucoup d’ami(e)s artistes coréens. J’aimerais avoir davantage d’amis artistes français mais il y a la barrière de la langue. Je fais partie d’associations d’artistes coréens.
Quels sont les peintres européens que vous aimez ?
J’aime beaucoup Claude Monet et suis allée plusieurs fois à Giverny. J’ai pris aussi de nombreuses photos sur place avant de peindre. J’aime aussi beaucoup Vincent van Gogh.
Depuis quand exposez-vous en France ?
J’ai commencé à exposer en 2005.
Quelles sont les expositions auxquelles vous avez participé en France ?
J’ai exposé à plusieurs endroits : au grand Palais, au Carrousel du Louvre, à l’hôtel de ville de Pantin, et cette année au Salon d’automne à La Villette, à Paris.
Comment avez-vous été sélectionnée au Salon d’automne ?
C’est la première fois que j’expose au Salon d’automne. C’est une autre amie artiste, Agathe Jung, qui m’a inscrite et j’ai été sélectionnée avec mon tableau « Harmonie de la nature ».
Hana et sa maman, l'artiste Eum Soon-Ok. © Nathalie Fisz
Un talent peut-il en cacher un autre ?
Comme je l’ai dit au début de cet article, c’est grâce à sa fille Kang Hana que j’ai fait la connaissance de l’artiste Eum Soon-Ok. Hana n’est pas non plus dénuée de talents. Loin de là. Arrivée en France en 1995, Hana enseigne le coréen depuis bientôt quatre ans. Elle est interprète et a travaillé pour des grands groupes comme Samsung, et aussi pour la présidence de la République de Corée. Elle est également journaliste pour KBS, SBS et YTN. Hana peut couvrir des évènements liés à la Corée en France, mais pas seulement. Par exemple, elle a fait des reportages sur le célèbre festival médiéval de Provins, le mouvement des gilets jaunes, etc.
Concernant l’activité artistique de sa maman, Hana raconte une anecdote. Une personne lui a dit qu’il croyait que les tableaux avaient été réalisés par un homme, tellement ils dégageaient de l’énergie et de la force. Hana raconte d’ailleurs comment sa maman peut peindre un tableau avec des traits de pinceaux très énergiques, elle peut aussi décider de faire des sacs de cuir, ou une table.
Le samedi 17 février, n’était pas seulement destiné à interviewer Eum Soon-Ok, car j’étais invitée pour le déjeuner.
Une inspiration impressionniste. © Nathalie Fisz
Comme des enfants à la campagne dans un tableau de Monet
Pour que je puisse faire mon interview dans les meilleures conditions possibles, Hana et ses parents m’ont accueillie dans la maison-atelier de Villejuif. J’ai pris les transports en commun et Hana est venue me chercher à la sortie du métro. Il faisait beau ce jour-là, et la rue où est située la maison de ses parents ressemble à une rue en province ou à la campagne. J’ai plaisanté avec Hana et lui ai dit que moi, la citadine, je devrais venir plus souvent prendre un bol d’air. La maison est également une maison d’hôtes. Issue d’une famille avec des frères et sœurs (cinq) dont elle est l’ainée, Eum Soon-Ok aime partager. Le partage commence aussi par le repas. Eum Soon-Ok est une fine cuisinière. Nous nous sommes rapidement installés à table avec Hana et ses parents.
Sur la table, de succulents plats nous attendaient : banchans, mandus, japchae, et bien sûr du kimchi. Le papa d’Hana, assis à ma droite, m’a dit avec le sourire que c’était son meilleur kimchi. La maison reçoit régulièrement des hôtes venus de Corée qui viennent déguster des plats coréens et ce fameux kimchi. La cuisine donne sur le jardin. Lumineuse, elle est décorée par plusieurs tableaux d’Eum Soon-ok dont une tour Eiffel toutes en couleurs. Il y a aussi une grande reproduction de la Joconde.
Hana m’a dit : « si tu veux encore quelque chose, ma maman va te le faire, ne t’inquiète pas, tu peux demander si tu veux. Ma maman n’arrête jamais, elle s’occupe tout le temps ». Nous sommes allées au jardin. Eum Soon-Ok a beaucoup de plantes grasses qu’elle connaît toutes. Hana m’a expliqué qu’à la belle saison, il y a des fleurs et des fruits. Il y a aussi des plants de raisin qui viennent de Corée.
Nous avons pris de belles photos au jardin, puis nous sommes remontées prendre un thé. Eum Soon-ok a gentiment proposé de me faire visiter sa maison et de voir ses tableaux. J’ai pu voir par moi-même un des lieux de ses créations.
À table, son mari m’a dit que le tableau bleu représentant Wolchulsan, contient le secret mystérieux du rocher. Ce tableau lui donne du réconfort comme s’il retournait dans sa ville natale, Yeongam, quand la vie est dure et fatigante.
Nous avons encore bien discuté et plaisanté. Nous avons parlé de peinture, car sur le tableau présentant la tour Eiffel, je pensais voir des petits personnages qui me faisaient penser aux peintures de Raymond Peynet. Je lui ai montré des dessins de cet humoriste illustrateur qui a créé en 1920 son célèbre couple d’amoureux. Elle m’a dit que chacun voyait dans son tableau ce qu’il désire. Puis après avoir remercié très sincèrement mes hôtes, je suis rentrée écrire pour ne pas perdre les sensations de la journée.
Dans un de ses catalogues d’exposition, Eum Soon-Ok a dit de façon très personnelle qu’elle rêvait d’un monde ou l’humain et la nature communiquent complètement par la médiation de la nature. Je ne peux douter de sa sincérité.
L'un des jardins d'Eum Soon-Ok. © Nathalie Fisz
Quelques mots encore
C’est ainsi que grâce à mon amie Kang Hana, je suis allée à la rencontre de sa maman, l’artiste Eum Soon-Ok.
Telles des enfants, nous marchions dans le jardin. Eum Soon-Ok a cueilli une petite plante et me l’a tendue en disant qu'elle se mangeait. J’ai fermé les yeux et quelques secondes après, elle m’a expliqué que la plante avait le goût de la ciboulette.
Jardin secret ou jardin réel. Nature ou peinture. Dans quel jardin suis-je entrée ?
Eum Soon-Ok veut exprimer dans sa peinture la forme de la nature elle-même. Si vous la rencontrez, il vous appartiendra de décider quel est le jardin qui vous est destiné.
Retrouvez toute l'actualité d'Eum Soon-Ok sur
son compte Instagram.
Kang Hana, Eum Soon-Ok et moi dans la maison-atelier de Villejuif, le 17 février 2024. © Kang Hana
* Cet article a été rédigé par une journaliste honoraire de Korea.net. Présents partout à travers le monde, nos journalistes honoraires partagent leur passion de la Corée à travers Korea.net.
caudouin@korea.kr