Journalistes honoraires

03.11.2025

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Par Emmanuelle Fourneyron

Alors que la ville de Gyeongju a récemment accueilli le sommet de la Coopération économique Asie-Pacifique (APEC, voir mes articles précédents sur le sujet ici et ici), à 10 000km de là, à Bordeaux, c’est une autre rencontre économique qui s'est tenue du 29 au 31 octobre derniers : le Global Forum for Social and Solidarity Economy, ou Forum mondial de l’économie sociale et solidaire, le GSEF.

Plus de 7 000 participants issus d’une centaine de pays, trois jours de session, 13 séances plénières, 169 tables-rondes : un franc succès pour le 7e forum de cette organisation internationale de gouvernements locaux et de réseaux de la société civile engagés dans la promotion de l’économie sociale et solidaire – une organisation qui a vu le jour en 2013 à Séoul, sous l'impulsion du maire de l'époque ! La capitale coréenne a même hébergé le siège de l’organisation jusqu’en 2021.

Des milliers de participants, en provenance d'une centaine de pays, ont participé au forum mondial 2025 de l'économie sociale et solidaire à Bordeaux. © Emmanuelle Fourneyron

Des milliers de participants en provenance d'une centaine de pays ont participé au forum mondial 2025 de l'économie sociale et solidaire à Bordeaux. © Emmanuelle Fourneyron


Pas étonnant donc que pour cette édition 2025, une délégation coréenne d’une cinquantaine de personnes avait fait le déplacement à Bordeaux. J’ai eu la chance de pouvoir rencontrer les responsables de la délégation, Mme Kim Bora, maire de la ville d’Anseong et co-présidente du GSEF Asie, et Mme Laurence Kwark, ancienne Secrétaire générale du GSEF. Un sympathique dîner en leur compagnie me donne l’occasion de découvrir deux femmes aux parcours riches et d’en apprendre plus sur ce secteur méconnu de l’économie coréenne, qui véhicule de belles valeurs de solidarité, d’engagement et de démocratie locale !

Frise chronologique qui relate les grandes étapes du GSEF, depuis sa création et sa réunion inaugurale à Séoul en 2013-2014. © Emmanuelle Fourneyron

Frise chronologique qui relate les grandes étapes du GSEF, depuis sa création et sa réunion inaugurale à Séoul en 2013-2014. © Emmanuelle Fourneyron


À l’étranger, on connait surtout l’économie coréenne au travers de la puissance de ses grands groupes. Et pour cause : les cinq plus grandes entreprises - Samsung, LG, Hyundai, SK Group et Lotte - pèsent pour les deux tiers de toutes les exportations coréennes ! On le sait moins : depuis la fin des années 90, dans le sillage de la grave crise économique de 1997 et sous l’impulsion du président coréen et de la montée en puissance de la société civile, une économie sociale et solidaire s’est progressivement développée en Corée. Il s’agit d’un tiers secteur, distinct tant de l’économie conventionnelle que du secteur public, par ses formes juridiques d’organisation, ses engagements en matière de gouvernance démocratique et de répartition des bénéfices, et surtout par ses finalités : parvenir à un développement local inclusif et durable, qu’il s’agisse du changement climatique, de la cohésion sociale ou encore des inégalités.

C’est un secteur encore marginal en Corée, qui représente à peine plus de 1 % des emplois totaux du pays, mais qui a été officiellement reconnu par plusieurs lois dont la loi de 2007 sur la promotion de l’entrepreneuriat social, qui a ensuite donné naissance à l'Agence coréenne pour la promotion des entreprises sociales (KoSEA). J’apprends d’ailleurs à l’occasion du GSEF que seuls 25 pays sur la planète, dont la Corée donc, ont légiféré et donné un cadre légal à ce secteur !

Quatre formes d’entreprises sociales et solidaires sont actuellement reconnues en Corée : les entreprises d'autosuffisance, les entreprises sociales, les entreprises communautaires villageoises et les coopératives. Aujourd’hui, on décompte ainsi environ 5 000 entreprises sociales, communautaires ou d’autosuffisance et 15 000 coopératives. Parmi celles-ci, près de 4 200 coopératives dites sociales œuvrent principalement dans les domaines de la garde d'enfants et des soins aux personnes âgées. D’après une note d’analyse de l’OCDE, la coopérative sociale est un modèle populaire en Corée, qui connaît une croissance rapide.

L'Institut de recherche des Nations Unies pour le développement social (UNRISD) a consacré un rapport à l'économie sociale et solidaire en Corée. © Emmanuelle Fourneyron

L'Institut de recherche des Nations Unies pour le développement social (UNRISD) a consacré un rapport à l'économie sociale et solidaire en Corée. © Emmanuelle Fourneyron


Surtout, ce secteur dispose du soutien engagé d’un réseau de villes et gouvernements locaux coréens engagés en faveur du développement de l’économie sociale : le SSEGOV. La cheffe de file de la délégation coréenne au GSEF 2025, Mme Kim Bora, est d’ailleurs l’active Présidente du SSEGOV ! En signe d’amitié, elle m’offre en cadeau de magnifiques verres en métal fabriqués par le savoir-faire artisanal de sa ville Anseong. Car c’est aussi cela, l’économie sociale : l’attachement aux territoires et aux diversités culturelles locales.

Chaleureuse soirée en présence de Mme Kim Bora, maire d'Anseong, co-présidente du GSEF Asie et présidente du SSEGOV, et de M. le consul honoraire de Bordeaux pour la Corée. © Emmanuelle Fourneyron

Chaleureuse soirée en présence de Mme Kim Bora, maire d'Anseong, co-présidente du GSEF Asie et présidente du SSEGOV, et de M. le consul honoraire de Bordeaux pour la Corée. © Emmanuelle Fourneyron


Sa collègue Laurence Kwark, dont le parcours au service de l’aide au développement international force l’admiration, est l’ancienne Secrétaire générale du GSEF et en est toujours aujourd’hui une des chevilles ouvrières. Membre du Comité scientifique du forum, elle est convaincue de l’importance et de la richesse qu’il y a à fédérer les acteurs de l’économie sociale au niveau international.

Le GSEF compte aujourd’hui 84 structures membres en provenance de 37 pays sur les cinq continents dont 24 gouvernements locaux, sept réseaux de gouvernements locaux, 23 réseaux d’acteurs de la société civile. Il bénéficie surtout d’une reconnaissance internationale croissante par les institutions multilatérales : notamment l’Assemblée générale des Nations Unies a adopté en avril 2023 une résolution intitulée « Promouvoir l'économie sociale et solidaire pour un développement durable ». Une belle réussite collective, dont la Corée peut être fière d’être une des artisanes !

Il reste bien sûr beaucoup à faire pour consolider et assurer le développement de cette économie si particulière, ancrée dans la solidarité et l’entraide. Partager les expériences face à l’emploi, l’égalité des genres, le vieillissement et la revitalisation territoriale, discuter des mesures nécessaires pour renforcer les écosystèmes de l’économie sociale, porter le plaidoyer à toutes les échelles locale, régionale, nationale, internationale : tels sont quelques-uns des messages que la délégation coréenne est venue porter à Bordeaux, à l’occasion de ce 7e forum mondial du GSEF.

Le GSEF, lieu d'échange et de dialogue autour de la promotion de l'économie sociale et solidaire © Emmanuelle Fourneyron

Le GSEF, lieu d'échange et de dialogue autour de la promotion de l'économie sociale et solidaire. © Emmanuelle Fourneyron


« Un autre monde est déjà là ! » : tel était le thème de cette édition 2025. Pour sûr, j’ai eu l’occasion de plonger, l’espace de quelques jours, dans un monde de belles rencontres, d'humanité et de solidarité par-delà les continents.


Présents partout à travers le monde, les journalistes honoraires de Korea.net ont pour mission de faire connaître et partager leur passion de la Corée et de la culture coréenne au plus grand nombre.

caudouin@korea.kr