Journalistes honoraires

31.07.2023

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Par la journaliste honoraire de Korea.net Vanessa Pisano de France


Anne-Claire Duval est une auteure talentueuse qui nous délivre sa passion de la culture coréenne sur sa page Instagram et au travers d’ouvrages papier.

Actuellement en préparation de son recueil des contes et légendes coréennes, Anne-Claire a fait appel à des bêta-lecteurs parmi sa communauté. J’ai eu la chance de participer à l'exercice. À la fin de cette aventure, nous avons programmé une interview visio en duplex, Anne-Claire en France, moi depuis Séoul, le 6 juin 2023.

Voici la transcription de notre échange, un moment authentique de partage.


Vanessa Pisano : Bonjour Anne-Claire, merci de te connecter à notre visio. Pour commencer, veux-tu te présenter en quelques mots ?

Anne-Claire Duval : Bonjour, Je suis Anne-Claire Duval, 25 ans, passionnée depuis l’âge de 12 ans par la Corée du Sud et le suis toujours autant. À l'époque, c’était peu connu. On découvre toute la vie, j’évolue, mes intérêts changent, donc j’apprends toujours dix ans après.

Portrait d'Anne-Claire Duval dans une Hanok en Corée du Sud. ©️ Anne-Claire Duval

Portrait d'Anne-Claire Duval dans une Hanok en Corée du Sud. ©️ Anne-Claire Duval


Comment découvre-t-on une culture lointaine à 12 ans ?

J’ai grandi dans une famille intéressée par les cultures étrangères, dont asiatique. En premier lieu, le Japon. La Corée est arrivée simplement par YouTube, avec la K-pop. J’aime ce qui bouge, met en joie. Donc ça a coché toutes les cases. Après quelques clips, j’ai annoncé à mes parents que j’avais découvert un super truc ! Mon père me révéla qu’il avait déjà connu la K-pop avec BOA en 2009. Il y avait des quartiers sur Paris centré Japon/Corée, il me proposa de les visiter. Quartier Sainte-Anne. Puis c’est allé très vite avec Internet. Ce sont de beaux souvenirs.

Quel accompagnement as-tu reçu de la part de tes proches ?

Au début c’était perçu comme une lubie et quand ton enfant découvre quelque chose tu as envie de le pousser à être curieux, à sortir de sa zone de confort. Sauf qu'au fil du temps je suis devenue fan. Et la passion prend de la place, du temps et de l’énergie.

Je me suis rapidement intéressée à tous les domaines, art traditionnel, littérature, dramas. Ce qui enrichissait ma propre culture.

J’ai souvent entendu : « bon, faudrait peut être que tu arrêtes avec tes trucs de coréens et que tu deviennes un peu sérieuse ».

Malheureusement j’ai été confronté au mépris de certaines personnes qui ne voyaient pas l'intérêt de ce genre de passion. Ça ne m’a pas arrêté ! Quand il y a du jugement, soit on se cache, soit on le crie encore plus fort. À qui veut l'entendre ! Rires.

Comment as-tu fait entendre ta voix ?

J’ai commencé à créer une page Facebook. J’étais en sixième, j’en ai parlé à tout mon collège ! J’ai sondé les 600 élèves, personne ne connaissait ou aimait. C’était parfait ! En classe de troisième , j’ai monté une association de danse coréenne : KPOP en France, puis au lycée c’est devenu Hallyu France avant de devenir KOREAC que nous connaissons.

Ça ressemble à un début de vocation plus qu’une lubie !

Oui ! Toutes mes journées étaient vouées à ça ! À 13/14 ans j'étais community manager de ma page Facebook. J’organisais des concours, des animations, j’écrivais des articles… Sauf que je n’avais pas le droit à Facebook, alors je me connectais à 21h00 en cachette. Et comme la K-pop était trop réductrice, j’ai ouvert sur la Hallyu.

La Hallyu, veux-tu nous dire ce qu’elle représente?

Il s’agit de la vague culturelle coréenne liée au divertissement. Soit la danse, la musique, la radio, les émissions et reportages TV, les drames historiques, etc. Donc je m’appuyais sur ça pour mon contenu : mettre en avant une ville, un paysage, un art traditionnel. Voilà comment je suis allée plus loin que la K-pop.

Quelle a été ton orientation pour tes choix « d'adulte » après l'adolescence alors que la passion est toujours là, qu’as-tu traversé ?

« Très compliquée ! J'aurai dû suivre mon instinct dès le début. »

C’est difficile quand tu es jeune, d'être épaulée. Par exemple mon activité sur Facebook, les proches ne comprennent pas que c'était quelque chose qui avait du potentiel car aujourd’hui, tenir un blog c’est un métier ! Alors que je le faisais par passion à l’époque.

Après le bac, j’ai suivi les summer-camp du Centre Culturel Coréen de Paris avant de démarrer une licence de Coréen. Pour mon rythme, c’était compliqué d’intégrer les deux heures de leçons pour le prochain cours. J’ai dû arrêter. Ce fut un coup au moral. Me dire que ma passion ne sera pas un métier, j’étais déçue.

J’ai suivi un DT tech de Com, puis une licence de commerce et un master digital.

Qu’est devenu KOREAC durant cette période ?

Mon projet KOREAC a toujours été présent à chaque étape de mes études. Il a même plus existé à ce moment-là que lors de ma licence de coréen !

Toutes mes nouvelles connaissances furent mises à profit. J’ai revu tout le blog, j’ai créé une identité visuelle, allant jusqu’à commercialiser deux box de K-cosmétiques pour Noël.

« J’ai testé des choses et fait fi du manque de connaissance des proches ou du mépris. »

Portrait d'Anne-Claire Duval en Hanbok en Corée du Sud. ©️ Anne-Claire Duval

Portrait d'Anne-Claire Duval en Hanbok en Corée du Sud. ©️ Anne-Claire Duval


Aujourd’hui, que t’apporte KOREAC ?

Bonne question ! Ça m'apprend à sortir de ma zone de confort et me stimule mentalement. Il faut savoir que je m’ennuie très vite ! J’ai toujours un million d’idées ! À mes débuts je faisais des interviews et pensais faire le tour de France, créer des E-book dans chaque ville, etc. Puis s’est présentée l’envie de passer à quelque chose de concret, aller au-delà d’articles.

Comment en es-tu venue aux livres ?

Pendant la période de confinement, j’ai créé une bucket list (liste de souhaits) pour KOREAC : écrire un livre, était dedans. J'étais tournée sur la lecture, j’ai donc contacté des maisons d'édition pour savoir si elles avaient des projets en interne en rapport à la Corée. De cette façon est né mon premier ouvrage, avec Larousse. Ils aimaient mon blog et cherchaient un auteur pour leur prochain livre sur la Corée. Aujourd’hui, je sais que les livres me correspondent mieux.

« Au cœur de la K-culture » est ton premier projet, qu'a-t-il apporté?

Ce fut super intense, un planning chargé. À l'époque, je faisais des journées de travail de 6h00 à 23h00. Pour obtenir une page par jour, il faut écrire, relire, synthétiser. Comme je souhaitais un rendu de qualité et authentique (bien sûr, notion propre à chacun !) par rapport à qui j'étais à cet instant avec ma vision de la Corée du Sud. Aujourd’hui, j’ai évolué et c’est plus nuancé.

Couverture du livre Tout pour préparer son voyage en Corée aux éditions Hachette. ©️ Anne-Claire Duval

Couverture du livre Tout pour préparer son voyage en Corée aux éditions Hachette. ©️ Anne-Claire Duval


Tu parles de vision nuancée, avais-tu une image idéalisée ?

Dans les émissions on les voit tout le temps joyeux, cette image parfaite m’attirait énormément car j’aime ce qui est parfait. Sauf que pour ce rendu parfait c’est une discipline énorme.

Je n'avais pas cette conscience de tout ce travail qu’il y a derrière, du rythme effréné, de la pression constante, de la maîtrise de l’image de soi.

Je pensais qu’ils étaient plus parfaits qu’en France. Et c'est une image idéalisée comme les étrangers peuvent avoir de la France et être déçus quand ils viennent. J’ai appris à prendre de la hauteur, à nuancer et me questionner sur ce qui est réel !

Comment, à 23 ans, s’affranchit-on des pensées limitantes et devient-on autrice ?

Si l’opportunité s’était présentée j'aurais pu écrire un livre sur la Corée du Sud à 16 ans. 23 ans pour moi c’est être adulte, donc je n’ai reçu aucun préjugé, j’étais apte à écrire et partager, comme avant sous un autre format.

Manifester nos rêves aujourd’hui c’est compliqué, les personnes questionnées n’ont pas vraiment de réponse, ou c’est juste du matériel. On croit qu’il nous faut respecter des âges de passage, faire ci, faire ça, etc.

Illustration Contes et légendes coréennes Yulryeo. ©️ Anne-Claire Duval

Illustration Contes et légendes coréennes Yulryeo. ©️ Anne-Claire Duval


« Quand on croit en ses rêves, à 11 ou 25 ans, si on se donne les moyens, ça fonctionne. »

Penses-tu avoir créé une communauté autour de toi ?

Je ne sais pas si on peut appeler ça comme ça. Pour moi une communauté c'est une sorte de pression. Il faut l’entretenir, être responsable des personnes qui te suivent, entretenir un lien, une relation. Émettre du contenu régulier. Je l'ai fait avant. Maintenant je suis plus détachée et mon partage est spontané.

Je suis sans ligne éditoriale, je suis infernale ! Tous les mois je teste quelque chose de nouveau. Je sais que c‘est important dans le digital. Cette approche me permet de faire des rencontres, c’est au-delà de la communauté. On se suit mutuellement autour d’une passion commune.

Avec la tendance du digital, on assiste à l'émergence des nouveaux mots, comme communauté, influenceur ou instagrammeur. Qu’en penses tu ?

Personnellement, je m'identifie comme autrice ! Je suis plus du côté papier que digital. KOREAC est une vitrine virtuelle pour exprimer ma créativité.

Quand il y a des grosses tendances comme la Hallyu, les plateformes de partages vidéos, poussent à créer du contenu encore et encore. Je comprends qu'on soit attiré et veuille y prendre part. Avec une ligne, du contenu, en étant assidu et avec une personnalité, ça peut être professionnalisé. Si les personnes sont attirées, je les invite à tester.

As-tu des conseils pour démarrer ?

Il faut publier et publier encore. Ne pas en avoir peur !

Nous pouvons attendre six mois, an an pour faire notre premier pas si on attend d’avoir la photo parfaite ou l’article parfait. Nous voyons beaucoup de contenu professionnel alors on a envie d'être au niveau pro dès le démarrage. Cependant, c'est au fil du temps qu'on le devient. Alors allez-y ! Faites le premier pas, même si ce n’est pas parfait.

Qu’ont généré en toi ces expériences avec la Corée du Sud ?

Elles sont un moyen de m’exprimer en termes d'émotions, de découverte, de créativité. Ça aurait pu être autre chose et non !

Je suis allée à la découverte de moi-même. Ce sont des choses que l’on peut déjà faire chez nous, mais le voyage permet de sortir de sa zone de confort. Une fois sorti on se dit : allez, je me lance à fond, plus rien à perdre, qu'importe le moyen, c'est pour m'exprimer. Donc au final, allons-y !

Extrait du livre Tout pour préparer son voyage en Corée aux éditions Hachette. ©️ Anne-Claire Duval

Extrait du livre Tout pour préparer son voyage en Corée aux éditions Hachette. ©️ Anne-Claire Duval


Y a t-il des liens franco-coréens que tu souhaites renforcer ?

Oui, avec mon premier livre, j’ai mis en avant la culture coréenne en créant des parallèles avec la France. Que ce soit simple sans être dépaysant. Car ce qui important, que le pays soit loin de nous ou non, nous sommes des humains avec nos cultures. Nul besoin de préjugés, nous n'avons qu’à nous laisser porter et découvrir. C’est en travaillant sur nos méconnaissances que nous comprenons que ce sont des humains, comme nous.

Es-tu confrontée à des remarques ou préjugés ?

Avant j'y étais sensible, aujourd’hui je ne réagis plus. Il réside une méconnaissance due à l’éloignement, pour autant le pays devient de plus en plus connu. Certains discours n’ont plus lieu d’être. À mon sens, il y a assez de ressources disponibles pour découvrir le pays, nous enrichir et changer nos mentalités.

Nous nous sommes rencontrées dans le cadre de ton projet d’écriture, veux-tu nous en dire plus sur son origine et tes démarches ?

J'écris un recueil de contes, fables et légendes coréennes. Il rentre dans un projet d’une collection des maisons Ynnis, la Corée succède aux fables et légendes japonaises déjà parues.

En licence, j’avais des cours d’histoire de la Corée et quand nous remontons le temps, nous rencontrons des légendes. Sauf que celles dans les livres sont souvent complexes et peu accessibles. J’ai fait le choix de sélectionner mes favorites et les plus emblématiques. Au fil de mes recherches, j’en ai découvertes de nouvelles, moins populaires et qui entrent dans la frise chronologique de la création du monde, l'origine du Soleil et de la Lune, le père fondateur de la Corée.

Grâce à toi, j’ai expérimenté le bénévolat bêta-lectrice, je te remercie de l’aventure. Veux-tu nous expliquer en quoi c’est important pour toi et ce qu’il est ressorti de cette expérience ?

Très commun dans la romance ou la fiction, moins dans l'écriture des contes, la bêta-lecture intervient après le premier jet d’écriture d’un texte fini, à contrario de l’alpha-lecture qui se fait au fil des chapitres. L’objectif est de recueillir un avis sur le fond et la compréhension des idées du texte, gommer les éventuelles informations redondantes, avoir un nouveau regard, etc. C’est donc pour moi une véritable méthode de travail et un défi personnel.

Car ne relisant jamais mes premiers jets, je vous partage mes textes à l’état brut et je sais à quel point ça a été dur pour vous ! Rires.

Je profite de cet espace pour remercier chaque participante de m’avoir offert leur temps pour mener à bien cette première étape cruciale de la création.

À titre personnel, comme j’adore me challenger, cela m’a permis de travailler sur l’expression de mes attentes et travailler ma « non susceptibilité ». Me souvenir que ce n’est pas personnel, que j’écris pour transmettre et partager, donc ce retour d’idées permet de rendre la première version plus digeste. Même si le texte sera ensuite relu et corrigé plusieurs fois ensuite.

La magie de l’aventure est qu'elle aura également permis aux participantes de vivre un test grandeur nature. Certaines avaient pour projet d’exercer dans l’édition, l'écriture, pour d’autres ce fut la découverte d’une potentielle vocation.

Illustration Contes et légendes coréennes Gumiho. ©️ Anne-Claire Duval

Illustration Contes et légendes coréennes Gumiho. ©️ Anne-Claire Duval


Nous arrivons au terme de notre échange, Anne-Claire, comment te vois-tu dans cinq ans et aurais-tu un message à nous transmettre ?

Je souhaite continuer à écrire des livres sur la Corée, il y a encore tant à découvrir et partager. Aborder de nouveaux sujets et aller plus en profondeur. Toujours sortir de sa zone de confort. Les projets personnels rendent vivant, on a le droit d'avoir peur, de douter. À chaque âge, chaque vie, ses difficultés. À nous de nous adapter.

Car avec humilité et bienveillance tout devient possible ! Quand une passion nous anime, qu’elle soit récente ou non, ne l'écartez pas ! Faites tout pour l’entretenir et entreprendre.


Je remercie Anne-Claire pour sa bienveillance et la sagesse dont elle fait preuve.

Au travers de ses expériences, on touche du doigt le chemin initiatique vers lequel nous sommes tous amenés à tendre :

« C’est possible, il suffit d’essayer. »

Pour en découvrir plus, rendez-vous sur la page de KOREAC, présente également sur Instagram.



* Cet article a été rédigé par une journaliste honoraire de Korea.net. Présents partout à travers le monde, nos journalistes honoraires partagent leur passion de la Corée du Sud à travers Korea.net.

caudouin@korea.kr