Par Andra Michaela

Le 2 juin 2025, la centrale nucléaire de Cernavodă en Roumanie a franchi une étape historique avec la cérémonie de la première coulée de béton de la toute première installation de dé-tritiation d’Europe, à Cernavodă dans l'est du pays (Cernavodă Tritium Removal Facility, CTRF). Cet événement incarne à la fois les progrès technologiques réalisés et le renforcement de la coopération entre la Roumanie et la Corée dans le domaine de l’énergie nucléaire.

Organisée en présence de représentants roumains et coréens, la cérémonie a souligné l’engagement commun à bâtir un avenir plus propre et plus sûr grâce à l’innovation, tout en affirmant l’importance stratégique de cette collaboration dans le contexte énergétique européen.


Un projet essentiel pour l’Europe et la Roumanie

L’installation de dé-tritiation est une infrastructure novatrice conçue pour extraire et gérer en toute sécurité le tritium, isotope radioactif généré dans les opérations nucléaires. Sa construction représente un pas majeur vers une amélioration des normes environnementales de la centrale de Cernavodă et une consolidation de la durabilité énergétique du pays.

Basée sur une technologie roumaine développée par l’Institut National de Recherche-Développement pour les Technologies Cryogéniques et Isotopiques (ICSI Râmnicu Vâlcea), la CTRF sera la troisième installation de ce type au monde et la première en Europe. Elle positionnera la Roumanie comme futur pôle européen de production et d’exportation de tritium – combustible pressenti pour les réacteurs à fusion du futur, tels qu’ITER.


L’installation intègre des technologies avancées : séparation isotopique en phase liquide, distillation cryogénique et opérations sous vide poussé, conformément aux exigences de sûreté nucléaire mises à jour par la CNCAN (National Commission for Nuclear Activities Control). Le projet devrait être achevé en 50 mois et le tritium produit sera stocké en toute sécurité dans des conteneurs spécialisés.

Le ministre roumain de l’Énergie, Sebastian Burduja, a déclaré : « Nous combinons l’excellence de la recherche roumaine avec des partenariats internationaux solides, comme celui avec Korea Hydro & Nuclear Power, pour offrir des solutions durables et sûres. »


KHNP et l’avenir de l’énergie propre

Korea Hydro & Nuclear Power (KHNP), opérateur nucléaire de renommée mondiale, joue un rôle central dans ce projet. Depuis décembre 2024, KHNP mène un contrat EPC de 1,9 milliard d’euros pour la modernisation de l’unité 1 de Cernavodă. Le projet, mené en partenariat avec Candu Energy (Canada) et Ansaldo Nucleare (Italie), voit KHNP diriger les travaux essentiels, dont la construction de l’installation de stockage des déchets radioactifs. Avec plus de 50 ans d’expérience, KHNP garantit une modernisation conforme aux normes internationales les plus strictes, prolongeant la durée de vie de la centrale et renforçant la sûreté nucléaire.

Cette coopération s’inscrit dans un partenariat stratégique plus large, englobant éducation, industrie et innovation. L’ambassadeur de la république de Corée, Kap-soo Rim, a salué l’engagement des ingénieurs coréens et souligné l’importance bilatérale de cette initiative : « KHNP ne fournit pas seulement de la technologie, mais contribue à bâtir un avenir énergétique sûr et durable. »


L’ambassade de Corée en Roumanie soutient activement les travailleurs coréens sur place, facilitant immigration, accès aux soins et sécurité. Des entreprises comme KEPCO KPS, Doosan Enerbility, Hyundai E&C et Samsung C&T participent également aux travaux, renforçant la présence industrielle coréenne dans la région.

Le PDG de KHNP, Whang Joo-ho, a déclaré : « Ce projet confirme notre expertise mondiale. Grâce à cette collaboration avec la Roumanie, nous contribuons activement à un avenir énergétique plus propre pour l’Europe. »


Une portée stratégique

La CTRF et la rénovation de l’unité 1 constituent des piliers majeurs de l’indépendance énergétique roumaine et de ses engagements en matière d’énergie propre. Le projet s’aligne avec la stratégie de décarbonation de l’Union européenne, en promouvant le nucléaire comme source fiable et bas carbone.

Cosmin Ghiță, directeur général de Nuclearelectrica (SNN), a souligné : « Ce n’est pas seulement un progrès technologique, mais une preuve claire de notre engagement pour un environnement plus propre et plus sûr. »


Grâce à cette avancée, la Roumanie peut désormais développer sa chaîne d’approvisionnement locale et exporter son savoir-faire en matière de dé-tritiation.

Whang Joo-ho a conclu : « Tout comme une structure solide repose sur une fondation impeccable, nous espérons que cette coulée de béton servira de base à la réussite du projet CTRF. KHNP restera engagé aux côtés de SNN jusqu’à son aboutissement. »


Un symbole fort de coopération bilatérale

Bien plus qu’un jalon technique, cette cérémonie marque une étape importante dans les relations entre la Corée et la Roumanie. Elle illustre la capacité des partenariats internationaux à impulser l’innovation et la durabilité dans les infrastructures critiques.

De mon point de vue, cet événement dépasse largement le cadre d’une simple étape technique. La cérémonie de coulage du premier béton pour l’installation de détraitement du tritium constitue une déclaration symbolique sur le type d’avenir que la Roumanie souhaite construire – un avenir fondé sur l’innovation, la durabilité et la coopération internationale.

En tant qu’observatrice attentive des relations entre la Corée et la Roumanie, je considère que ce projet incarne ce que de tels partenariats peuvent offrir de meilleur. Il associe la recherche de pointe roumaine, comme la technologie développée à l’ICSI de Râmnicu Vâlcea, à l’expertise reconnue de KHNP dans la réalisation d’infrastructures nucléaires complexes et à fort impact. Ce chantier représente bien plus qu’un projet de construction – il constitue une rampe de lancement pour que la Roumanie joue un rôle de premier plan dans la transition énergétique propre de l’Europe, tout en renforçant le pont entre l’Europe et l’Asie par l’excellence scientifique partagée.


Note : Cet article s’appuie sur des informations et déclarations fournies par KHNP, l’Ambassade de la République de Corée en Roumanie, et le ministre roumain de l’Énergie, Sebastian Burduja.


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