Journalistes honoraires

15.06.2022

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Par la Journaliste honoraire de Korea.net Lisa Lebel de France, photos Lisa Lebel

Le 12 mai dernier une galerie du marais vernissait l'exposition « Une autre scène de Corée ».

Cette exposition met en avant quatre artistes coréens qui ont fait le choix de venir s'installer à Paris pour devenir artiste ; Joowon Jo, Jihee Han, Seunghwan Lee et Hyeoki Kwon.

Ces dernières années ont vu apparaître un fort intérêt pour la culture coréenne, largement globalisée en Europe.

La Corée du Sud est devenue une place très attractive pour le marché de l’art, avec l’arrivée de galeries internationales et l’émergence de foires d’art contemporain à travers le pays : La biennale de Gwangju, Busan artfair, Frieze Art Fair à Séoul. Mais si le marché de l’art en Corée du sud est sous les projecteurs, ses artistes en France peinent à se faire connaître face à des pays tels que la Chine dont les artistes se sont fait une place importante dans les galeries françaises.

Quelques grands noms d’artistes coréens résonnent en France tels que Lee Bae, Lee Ufan, Lee Ungno ou Bang Hai Ja tous arrivés en France entre 1955 et 1960. Mais ces derniers sont représentés par les méga galeries Perrotin ou Thaddeus Roppac et sont de la troisième génération. En dehors de ces galeries il est très rare d’être amené à visiter une exposition avec des artistes coréens plus jeunes ou émergents. Depuis l’école Dansaekhwa qui s’est formée grâce à cette génération d'artistes, aucun pont n’a été fait avec une nouvelle génération. Il reste dans l’imaginaire collectif l’idée d’un art coréen attaché au minimalisme et à l’abstraction uniquement.

Il se pose alors nécessairement la question suivante : pourquoi aucun artiste contemporain coréen ne se fait-il sa place en France ? Cela vient-il d’un manque d’intérêt des pratiques artistiques contemporaines coréennes ?

L'exposition « Une autre scène de Corée » met ainsi en avant une nouvelle scène, plus jeune, qui a renouvelée matières et sujets traditionnels dans une pratique contemporaine. Elle est pour la plupart, leur première exposition en galerie française.



Pour définir ce qu'est la scène coréenne, l'exposition ici s’intéresse surtout à l’aspect générationnel, puisque tous font partie de la même génération nés dans les années 1980. Ces artistes se sont formés au contact des écoles d’art de France. Le parcours respectif des artistes que l'exposition présente et leur démarche indiquent que la dynamique de la scène artistique coréenne tend vers des caractéristiques communes. Et malgré une prise de liberté dans les pratiques artistiques, on ressent l’influence des expressions occidentales. Ainsi, cette double dimension offre un art traditionnel et un art « recomposé ». Je pense notamment à l’implication du corps et de l’intellect, au processus de répétition et surtout de méditation. La scène coréenne est à l’heure actuelle considérée comme une des plus dynamiques du continent asiatique. Le travail de ces artistes s’éloigne alors peu à peu des écoles de peinture qui ont façonné l’histoire de l’art contemporain de la Corée. Ils abandonnent désormais un langage plastique commun, souvent préoccupé par une dominante esthétique, au profit d’une exploration de l’humain, de la nature et s’interrogent sur la pluralité des expressions et des potentialités plastiques.

Une autre scène de Corée propose un nouveau regard sur cette diversité artistique dont les œuvres nous offrent un aller-retour entre attachement culturel et recherche contemporaine. L’exposition explore la relation entre le tangible et l’immatériel, le visible et l’impénétrable au travers d’un langage avant tout organique et spirituel.



Une autre scène de Corée c'est aussi quatre visions distinctes de la relation entre l'homme et la nature. En Corée, où 70 % du territoire coréen est recouvert de montagnes et de forêts, le continent lui-même étant bordé par la mer, la dimension spirituelle, qui s’est développée en lien avec le bouddhisme, le taoïsme et le confucianisme, rattache l’homme à la nature comme ne formant qu’un. De ce fait, l’influence que la nature exerce sur la culture coréenne tombe sous le sens. L’homme s’harmonise et s’assimile directement à elle, il semble que cela soit ce que chacun de ces quatre artistes exprime dans leur travail.

Seunghwan Lee rapproche arts et sciences dans une recherche vivante. Pour ce jeune artiste né à Séoul, l’humain et la nature peuvent être contrôlés par le calcul ou par des modèles mathématiques. Derrière la beauté des formes dans la nature se cachent des nombres, des relations harmonieuses que les mathématiques révèlent. Alors qu'en face de ses œuvres on peut découvrir une vision plus intime portée par Hyeoki Kwon qui lui cherche dans son travail à installer un dialogue réciproque avec la nature, parfois au moyen d’expériences physiques. Joowon Jo va quant à lui aborder des techniques digitales très contemporaines pour traiter d'une approche spirituelle. Il mêle métaphoriquement quête spirituelle et médias technologiques, tels que l’UV mapping ou la 3D en représentant des petites pierres de gués qui forment des chemins sur ses œuvres. Enfin les toiles de Jihee Han, seule peintre de l'exposition, explore une nature silencieuse dont le point de départ se trouve dans la méditation. Elle nous emporte ainsi vers une réflexion spirituelle plongée entre mers et montagnes.

Une autre scène de Corée réunit ainsi quatre artistes autour d’un récit créatif issu autant de la contemplation de la nature que d’une approche parfois contradictoire de la relation qui unit l’homme à celle-ci.

Exposition du 12 au 31 mai 2022 à la Galerie Odile Ouizeman 10-12 rue des coutures Saint-Gervais, Paris



* Cet article est rédigé par un journaliste honoraire de Korea.net. Notre groupe des journalistes honoraires est partout dans le monde, pour partager sa passion de la Corée du Sud à travers Korea.net.

etoilejr@korea.kr