Journalistes honoraires

20.05.2025

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Par Denis Labbé

8 mai 2025. Le cardinal Robert Francis Prevost devient le 267e pape de l'Église catholique sous le nom de Léon XIV. Vu de France, quel impact cette élection peut-elle avoir en Corée ? Quelle place l’Église catholique y tient-elle ? Et quel rôle l’Église de France a-t-elle joué dans le développement du catholicisme ?

Le pape Léon XIV à la loggia du Vatican, le 8 mai 2025. © Vatican News

Le pape Léon XIV à la loggia du Vatican, le 8 mai 2025. © Vatican News


Je me suis posé ces questions parce qu’en découvrant le groupe aespa, j’ai appris que Karina avait révélé appartenir à la communauté catholique et avait été baptisée sous le nom de Catharina. J’ai été surpris, parce que je ne soupçonnais pas l’importance du christianisme dans le pays.

La place de l'Église catholique en Corée est assez méconnue en Europe. Et pourtant, son influence n’est pas négligeable. L’élection du nouveau pape pourrait d’ailleurs avoir un impact non négligeable sur la société coréenne.

Les débuts du catholicisme en Corée

L’évangélisation du pays ne débute pas de manière habituelle par l’envoi de prêtres, comme ce fut le cas dans une bonne partie de l’Asie. À la suite de l’invasion japonaise de 1592 et de l’occupation de la Corée, le roi de Corée devait, chaque année, envoyer des ambassadeurs en Chine pour rendre compte à ses colonisateurs. Selon Le catholicisme en Corée (1924), « les annales coréennes mentionnent que, déjà en 1631, un ambassadeur de Corée put se mettre en relation avec ces fameux Jésuites, et au commencement du 17e siècle, l’ouvrage du père Ricci, "Véritables principes sur Dieu", est déjà connu en Corée. »

Il faut néanmoins attendre plus d’un siècle avant que des intellectuels coréens ne diffusent les écrits de ce jésuite italien qui est reconnu comme l’un des pères fondateurs de l’histoire chinoise. La méthode qu’il a appliquée en Chine, l’évangélisation des élites, se répand en Corée.

En 1784, Lee Seunghun est baptisé sous le nom de Pierre et pose les bases de l'Église catholique coréenne en donnant la première messe à Séoul, à l’endroit où sera érigée la cathédrale de Myeongdong.

L'intérieur de la cathédrale de Myeong-dong. © Korea.net DB

L'intérieur de la cathédrale de Myeongdong. © Korea.net DB


L’évolution du catholicisme en Corée

Le catholicisme démarre donc par le haut, gagnant petit à petit, mais difficilement, les campagnes. Durant plus d’un demi-siècle, aucun prêtre n’est ordonné, jusqu’à ce qu’en 1831, Léon XII crée le vicariat apostolique de Corée dont la mission est confiée aux Missions étrangères de Paris.

En 1884, la liberté du culte est accordée aux croyants. Celle-ci est remise en cause par la nouvelle invasion japonaise, avant que la fin de la Seconde guerre mondiale n’offre une liberté totale aux Catholiques.

En 1942, Mgr. Paul Ro Kinam devient le premier évêque coréen nommé, tandis que Mgr Kim Souhwan est le premier cardinal en 1968. Auparavant, seuls des évêques étrangers étaient en place, notamment des Français. Le catholicisme se développe alors de manière conséquente, puisqu’il passe d’un seul diocèse à neuf en 2014, pour atteindre seize en 2025. En 2022, la Corée comptait près de six millions de fidèles, un nombre en constante augmentation.

La présence de religieux de la mission étrangère de Paris, comme Mgr René Dupont, dernier évêque français de Corée, n’est pas étrangère à ce développement.

Mgr René Dupont, lors des 50 ans de la fondation du diocèse d'Andong. © Vatican News

Mgr René Dupont, lors des 50 ans de la fondation du diocèse d'Andong. © Vatican News


Les deux visites de Jean-Paul II en 1984 et 1989 rencontrent un franc succès. Lors de sa première venue, il canonise une centaine de Coréens, prononce d’importants messages et adresses aux différents corps du pays. Comme on peut le lire sur le site du Vatican, son message pour la journée des enfants le 4 mai 1984 touche par son universalisme. « Ce dont je veux vous parler, c’est de l’amour, l’amour pour lequel vous avez été faits, l’amour que chacun d’entre vous désire. » Il termine par ces mots. « Chers enfants de Corée, votre avenir et le destin de cette terre dépendent, sous le regard de Dieu, de votre volonté d’aimer. C’est mon message pour aujourd’hui et pour les années à venir, mon message d’amour. » Il est accueilli à Kwangju par près de 70 000 personnes qui scandent « Kyohwang Manse ! » (Dix mille ans de vie au pape !) comme l’écrit Philippe Pons dans un article du journal Le Monde daté du 5 mai 1984.

Lors de sa venue en 2014, le pape François déclare ceci devant 45 000 personnes dans un stade de Séoul. « C’est une grande joie pour moi de venir en Corée, "la terre du matin calme", et de faire l’expérience, non seulement de la beauté naturelle de ce pays, mais par-dessus tout de la beauté de son peuple ainsi que de la richesse de son histoire et de sa culture. » Il s’inscrit dans la lignée de Jean-Paul II. « Je vous assure du désir constant de la communauté catholique coréenne de participer pleinement à la vie de la nation. »

Le pape François célébrant la messe en Corée, en août 2017. © Vatican News

Le pape François célébrant la messe en Corée, en août 2017. © Vatican News


L’impact du catholicisme dans la société coréenne

Comme on l’a vu plus haut, l’entrée du catholicisme s’est faite par les élites. Cette religion imprègne surtout les classes moyennes et supérieures. Dans le monde de la K-pop, de nombreux artistes n’hésitent pas à mettre en avant leur appartenance religieuse. Derrière la star BoA qui a été nommée ambassadrice de l’Asian Youth Day et Son Naeun d’Apink, on peut citer Karina d’aespa, Hwasa et Wheein de Mamamoo, Chaeyoung de Twice, mais aussi Yunho d’Ateez, Felix de Stray Kids, Ju Haknyeon et Sangyeon de The Boyz, Hyunsik de BTOB ou encore Huening Kai de TXT.

Karina d'aespa faisant de la poterie. © aespa

Karina d'aespa faisant de la poterie. © aespa


Le dynamisme du catholicisme en Corée se matérialise dans la nomination en 2021 du cardinal Lazarus You Heungsik comme préfet du Dicastère pour le clergé. Proche du pape François qui a d’ailleurs préfacé son livre Comment l’éclair vient de l’Orient, il devient aussi le supérieur de Robert Francis Prevost, futur pape Léon XIV, membre de ce même dicastère.

À l’instar des organisations bouddhistes, les différentes congrégations catholiques s’inscrivent en garantes du respect des règles démocratiques en Corée. Régulièrement, elles appellent à davantage de paix et de justice, ce à quoi aspire la société coréenne.

L’attente de la venue de Léon XIV

Le pape François portait une grande attention à l’Asie, comme en témoigne son long voyage en septembre 2024. Mais surtout, il avait décrété l’organisation des Journées Mondiales de la Jeunesse en 2027. C’est un honneur offert au pays du Matin clair, puisque ce ne sera que la seconde édition en Asie. Si les Coréens attendaient le pape François, ils devraient voir la venue de Léon XIV.

L’élection de ce dernier a d’ailleurs été saluée par la classe politique coréenne. Lee Jaemyung du Parti démocrate a déclaré : « Il a dédié sa vie à l’amour du prochain et au service de la justice sociale », soulignant également son message pour la paix dans le monde, en espérant que sa venue pourrait l’apporter aussi en Asie. En cela, il reprend à son compte les messages des deux précédents papes qui ont posé le pied sur le sol coréen.

L’élection de Léon XIV pourrait donc apporter un nouveau souffle en Corée et dans la région, y renforçant la démocratie et le désir de paix qui habite les peuples de la région.


Présents partout à travers le monde, les journalistes honoraires de Korea.net ont pour mission de faire connaître et partager leur passion de la Corée et de la culture coréenne au plus grand nombre.

caudouin©korea.kr