Pour Lee Donggeun, l’auteur derrière « Yumi's Cells », la chose la plus importante à faire lorsqu’on dessine un webtoon et de toucher le maximum de personnes et de miser sur la légèreté et facilité de lecture que leur format offre. © Lee Donggeon
Par Kim Seon Ah
Yumi, 32 ans, est une femme ordinaire qui mène une vie ordinaire. Sauf que ses désirs sont contrôlés par ses neurones. L'existence banale de Yumi, quoique légèrement farfelue, est racontée dans le célèbre webtoon
Yumi’s Cells, sorti en 2015. Selon son auteur, Lee Donggeon, c’est justement le fait que l'histoire de Yumi soit ordinaire qui explique sa popularité.
L'arrivée dans le monde des webtoons de cet auteur de 42 ans est quelque peu particulière. Autrefois employé d'une papeterie, c'est le design d’un autocollant pour journaux intimes qui le pousse vers la voie du dessin.
Lee Donggeon débarque avec son premier webtoon, intitulé
A Bittersweet Life, en 2011. Viendront ensuite d'autres œuvres, dont
Yumi’s Cells en 2015 et
Daily JoJo en 2021. Entretien avec cet adepte des histoires ordinaires.
Vous êtes un spécialiste du dessin « mignon », tout en rondeurs. Comment êtes-vous arrivé à un tel style ?
Je n’ai pas changé de style de dessin depuis que j’ai quitté mon travail à la papeterie ! J’ai juste un peu peaufiné les détails lors de la sortie de
A Bittersweet Life. Mais au fur et à mesure de mes créations, j’ai compris qu’il était nécessaire de porter une attention particulière aux détails de mes personnages afin qu’ils puissent exprimer correctement leurs émotions. Les formes rondes et mignonnes qui caractérisent mon style se sont seulement progressivement affinées.
Vos œuvres se caractérisent par l’absence de tout pouvoir magique ou surnaturel dans vos personnages.
Je crois que les personnages ordinaires, au contraire des personnages extraordinaires, permettent plus facilement au lecteur de s’y identifier, de les comprendre, de les encourager, voire de carrément se substituer à eux. C’est sûrement pour cette raison que j’ai pu grandir si vite en parallèle de mes personnages.
Le « neurone de l’amour », un des nombreux neurones de « Yumi's Cells ». © Lee Donggeon
Malgré tout, Yumi’s Cells reste une histoire un peu particulière : ce sont les neurones des gens qui renferment et contrôlent leurs désirs !
Je dis souvent pour rire que « mes neurones de l'amour doivent être morts », ou que « je ferai ça la semaine prochaine ». J'utilise ces expressions dans mes œuvres, comme pour y ajouter une petite touche amusante et particulière, comme le font les neurones dans
Yumi’s Cells.
Yumi’s Cells a également été adapté en série. Comment l’avez-vous trouvée ?
J’ai beaucoup aimé voir mon travail porté à l’écran ! En revanche, je suis convaincu que dessiner un webtoon et réaliser une série sont deux choses radicalement différentes. Je n’ai donc pas participé à sa réalisation, mis à part quelques éclaircissements que j'ai pu apporter à l'équipe quant à l'histoire originale. Je crois que les changements qui ont été apportés à la série par rapport à l’œuvre originale étaient justifiés et ne les ai pas trouvés particulièrement dérangeants.
« Yumi’s Cells » a été adapté en série en 2021 sur la plateforme de streaming Tving. Elle a été diffusée dans plus de 160 pays dans le monde. Affiche de la deuxième saison de « Yumi’s Cells ». © Compte Instagram de Tving
Vous abordez le côté ordinaire de la vie et de l’amour dans vos œuvres. En dehors de cela, y a-t-il un genre particulier que vous appréciez en tant que lecteur de webtoon ?
Je crois que je lis le même genre de webtoons que ceux que je crée ! J’aime quand les dessins sont mignons et quand la psychologie des personnages est abordée de façon détaillée. J’aime aussi les essais et les webtoons qui parlent de la vie quotidienne.
Les webtoons coréens connaissent de plus en plus de succès à l’échelle mondiale, tout en connaissant de véritables problèmes liés aux droits d’auteur.
Il existe de nombreuses dérives quant à la diffusion illégale de webtoons. Malgré cela, je crois que c’est parce que les lecteurs sont conscients des enjeux liés à la propriété intellectuelle que le marché payant des webtoons se développe à une telle ampleur. Si je devais m’adresser aux lecteurs de cette interview, je voudrais plutôt les remercier.
Que prévoyez-vous d’écrire pour vos prochaines histoires ?
Je ne pense pas changer de style. Continuer à écrire des histoires ordinaires, mais légèrement pimentées d'une saveur un peu spéciale. C’est ce que j’aime dans les webtoons. Ajouter un peu d’imagination à des histoires ordinaires.
Autoportrait caricatural de Lee Donggeon. Nommé « Loving Geon », il apparaît dans son nouveau webtoon, « Romance Sugar Content 100% ». Ce barbu ronchon n’est pas sans rappeler le capitaine Haddock des « Aventures de Tintin », dont le style est apprécié par l'auteur sud-coréen. © Lee Donggeon
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