Affiche du 27e Festival International des Cinémas d’Asie de Vesoul 2021. Ⓒ Marie Melcore
Par la Journaliste Honoraire de Korea.net Danielle TARTARUGA de France
Je m’intéresse aux cinémas d’Asie et plus particulièrement au cinéma coréen, aussi, il m’a paru intéressant de pouvoir faire découvrir par le biais de cet article, un des dix plus grands festivals de France.
Il a été créé par Martine et Jean-Marc Thérouanne en 1995 et son succès ne se dément pas au fil des ans, puisqu’il a accueilli plus de 630 000 spectateurs depuis lors. Ses co-fondateurs ont reçu conjointement de multiples prix, dont, entre autres en 2016 le Trophée de l’année France-Corée, des mains du Ministre de la Culture, des sports et du Tourisme de la République de Corée, et en 2018 le Korea Cinema Award lors de la cérémonie d’ouverture du 23e Festival de Busan.
Ce festival est aussi considéré comme un des quatre festivals socles par le CNC (Centre National du Cinéma et de l’image animée) et ce n’est pas sans raison ! C’est ce qui a motivé cet entretien avec Jean-Marc et Martine Thérouanne, j’avais envie d’en savoir davantage sur cette formidable aventure humaine et sur les projets à venir de ce festival international, avec en filigrane la Corée bien-sûr !
La Corée a toujours fait partie des programmations du FICA, pouvez-vous nous expliquer ce que vous appréciez dans le cinéma coréen et quelles sont selon vous ses spécificités ?
Jean-Marc Thérouanne : En plus d’un quart de siècle, nous avons présenté 130 films coréens, décerné plus d’une vingtaine de prix aux professionnels du cinéma coréen dont trois Cyclo d’or (Zhang Lu - 2006, O Muel - 2013, Lee Yong-seung - 2014) et quatre Cyclo d’or d’honneur (Lee Doo Yong -2005, Kim Dong-ho - 2011, Im Sang-soo - 2016, Jay Jeon - 2020).
Kim Dong-ho recevant le Cyclo d’or d’honneur (2011) Ⓒ Club SNCF
Nous avons découvert, il y a 30 ans, le cinéma coréen au tout début des années quatre-vingt-dix, quand Jacques Maréchal, des Grands Films Classiques, a distribué, avec l’aide du Centre Culturel Coréen, dix chefs d’œuvre d’Im Kwon-taek, de Lee Doo-yong et de Bae Chang-ho. À ce propos, il est justice de souligner le travail remarquable de Georges Arsenijevic, conseiller technique du Centre Culturel Coréen de Paris, en ce domaine.
Petit à petit nous nous sommes intéressés à l’ensemble de l’histoire du cinéma coréen. Nous avons été frappés par l’extraordinaire diversité des genres abordés et la grande qualité des films coréens, comparable en cela au cinéma japonais. Cela est vrai dès avant la Guerre de Corée, malheureusement celle-ci a été effroyablement destructrice du pays dans tous les domaines humains, économiques, culturels dont cinématographiques.
À partir de 1955, l’industrie cinématographique se reconstruit. À côté du cinéma commercial des studios de Chungmuro, voire en son sein, émerge un cinéma d’auteur. L’arrivée de la démocratie, en 1993, libère la création. Le cinéma indépendant explose. Le cinéma coréen est une cinématographie majeure à faire connaître, ce que nous avons fait à notre échelle. C’est ce qui nous a valu de recevoir le Korean Cinema Award le 4 octobre 2018 lors de la cérémonie d’ouverture du 23e Festival International du Film de Busan devant 4000 spectateurs et les médias coréens et internationaux.
Photo de la remise du Korean Cinema Award le 4 octobre 2018 au 23e BIFF à Martine et Jean-Marc Thérouanne Ⓒ BIFF
Quels seront les films coréens à l’affiche pour la 27e édition en 2021 et comment avez-vous découvert ceux-ci ?
Jean-Marc Thérouanne : Les films coréens à l’affiche du 27e FICAV 2021 seront avant tout des films sélectionnés dans la section thématique « l’Histoire en toile de fond » (« Entre deux rives » de Kim Ki-duk, « Jiseul » d’O Muel) et des films en compétition présentés en première française (« Gull » de la réalisatrice Kim Mi-jo, « Good Person » du réalisateur Jung Wook).
Nous sommes en contact avec les maisons de production asiatiques ou européennes qui produisent des films de réalisateurs asiatiques. Nous nous intéressons à la sélection de festivals comme Venise, Locarno, San Sebastian, Jeonju, El Gouna, et bien sûr l’incontournable Busan avec lequel nous avons des liens forts d’amitié. Nous sommes aussi contactés directement par des réalisateurs et producteurs lorsque nous ouvrons la campagne d’inscription à la sélection de notre future programmation par le biais de notre site web
www.cinemas-asie.com.
La Corée sera moins présente lors du 27e FICA, il sera mis l’accent sur la Chine avec un hommage à Xei Fei, chef de file des réalisateurs chinois de la quatrième génération, en sa présence, et sur les cinémas des routes de la soie (Kazakhstan, Kirghizistan, Ouzbékistan, Tadjikistan, Turkménistan, Afghanistan, Iran). La présidente du Jury international sera la grande actrice iranienne Leila Hatami (prix d’interprétation féminin Berlin 2011 pour son rôle dans Une Séparation, le film iranien au million d’entrées au box-office France).
Jay Jeon, Président du Jury International recevant le Cyclo d’or d’honneur (2020) Ⓒ Jean-François Maillot
Quelles sont les mesures spécifiques (liées à la Covid) qui seront mises en place pour accueillir les spectateurs en 2021 ? Allez-vous programmer des conférences ou interviews à distance avec certains producteurs ou autres professionnels ?
Jean-Marc Thérouanne : Nous sommes en contact avec la préfecture de la Haute-Saône l’informant de tout ce que nous mettrons en œuvre pour garantir la sécurité sanitaire durant le festival. Nous respecterons toutes les règles exigées par les autorités.
Nous avons analysé les possibilités de pouvoir maintenir le 27e festival en toute sécurité sanitaire.
C’est à la Préfecture que revient la décision d’autoriser ou non le maintien de cette 27e édition.
Nous avons en effet prévu des visioconférences pour maintenir le lien entre les festivaliers et les réalisateurs et professionnels du cinéma qui ne pourront venir.
Nous avons prévu de louer des salles plus grandes pour pouvoir espacer réglementairement les festivaliers. Nous avons prévu des masques, des hectolitres de gel hydroalcoolique, la désinfection des lieux, notamment d’aisance, toutes les heures par une équipe spécialisée, l’instauration d’un sens de circulation dans le multiplexe Cinéma Majestic - Espaces des lumières, le marquage au sol pour respecter les distances, une grille horaire évitant les temps d’attente. Nous ne ferons pas de soirée après les projections mettant à l’honneur une cinématographie nationale ou un réalisateur, ni de journée professionnelle ou de table ronde, ni d’animation culturelle comme à l’accoutumée. La prudence sera de rigueur en raison de cette période hors norme. Nous espérons pouvoir maintenir une brève introduction des films par les réalisateurs, acteurs, producteurs, organisateurs du festival ainsi que des Q/A après les séances, écourtées adaptée à la situation. En raison des temps incertains dus à l’épidémie il a été nécessaire de réduire la programmation de 90 à 64 films, ainsi l’hommage à Koji Fukada a dû être reporté à février 2022.
Quels sont vos projets pour les années à venir ? Un super-Festival pour la 30e Edition ? Vous vous projetez déjà ?
Jean-Marc Thérouanne : De par sa nature un festival est annuel. Il est donc logique d’avoir le projet de mettre en place le 28e Festival International des Cinémas d’Asie de Vesoul en février 2022. Plusieurs thématiques, Regard sur une cinématographie nationale, Hommage à un réalisateur, acteur, producteur, (homme ou femme cela va de soi dans notre esprit) sont déjà en chantier.
L’histoire du Festival International des Cinémas d’Asie de Vesoul est jalonnée d’éditions plus particulières de cinq ans en cinq ans. L’ouverture de chacune de ces éditions quinquennales, a donné lieu à une mise en scène particulièrement travaillée, avec des mini-spectacles d’artistes asiatiques (cerfs-volants afghans, tambours japonais, concert de harpes chinoises, ballet de danses philippines, chanteuse et musiciens vietnamiens, ...). Bien évidemment de nouvelles idées sont en germes pour le trentième Festival International des Cinémas d’Asie de Vesoul en février 2024. Ce qu’il y a de terrible dans la vie c’est de ne pas avoir assez du temps biologique dont dispose un être humain pour réaliser tous les projets qui sont en lui.
L’âme du festival, ambiance chaleureuse et festive / danseuses coréennes Ⓒ FICA
Quels sont selon vous les atouts de ce festival international ?
Jean-Marc Thérouanne : Les atouts de ce festival c’est son âme. L’écrivain Laurent Bayart, fin observateur du Festival International des Cinémas d’Asie de Vesoul, où il se rend depuis de nombreuses années, dans son ouvrage « V’Asie à Vesoul ! Les 25 ans du FICA » décrit parfaitement l’âme du FICA : « ce festival, où chaque spectateur porte un nom, constitue un événement unique et rendez-vous annuel précieux en mode « intérieur/nuit » et en version (très) originale ! ».
Merci pour cette première rencontre très intéressante, qui je pense va attiser la curiosité des lecteurs de Korea.net et leur permettre de découvrir ce super festival, voire d’y participer en 2021 ! j’aurai le plaisir de vous retrouver prochainement avec votre épouse, afin que vous nous expliquiez, comment ce festival est né et quels furent ses temps forts. A très bientôt !
Pour en savoir plus sur le FICA :
Site internet : www.cinemas-asie.com
Page Facebook : www.facebook.com/FicaVesoul
Instagram : @FICAVesoul
Twitter : @FICAVesoul
Information de dernière minute : en raison du nombre de cas Covid-19 qui ne faiblit pas ce qui pourrait entraîner un troisième confinement en France dès le début de l’année, le festival ne pourra malheureusement pas être maintenu en 2021. Rendez-vous est pris en 2022! J’espère que nous serons nombreux à y participer. J’ai une petite pensée particulière pour tous les organisateurs de ce genre d’événements , pour Martine et Jean-Marc Therouanne mais aussi pour tous leurs bénévoles. La culture est essentielle dans tous les pays du monde, restons mobilisés pour lutter contre le Covid-19 !
* Cet article est rédigé par un journaliste honoraire de Korea.net. Notre groupe des journalistes honoraires est partout dans le monde, pour partager sa passion de la Corée du Sud à travers Korea.net.
etoilejr@korea.kr