Entretiens

09.11.2023

K-pop, K-food, K-dramas... la vague coréenne déferle sur le monde entier. Parmi ceux qui la nourrissent, il y a les « Coréens d'outre-mer » : des ressortissants sud-coréens installés à l'étranger ou des personnes d'origine coréenne possédant une nationalité étrangère. Korea.net et l'agence de presse Yonhap sont partis à la rencontre de ces personnes hybrides ayant une double culture, véritables ponts entre la Corée et leur pays de résidence.


La violoniste Kim Yoon Hee se produit le 3 août au Benaroya Hall de Seattle pour commémorer le 70e anniversaire de l'alliance bilatérale entre la Corée et les États-Unis.

La violoniste Kim Yoon Hee se produit au Benaroya Hall de Seattle lors d'un concert commémoratif du 70e anniversaire de l'alliance entre la Corée du Sud et les États-Unis, le 3 août 2023.



Par Lee Dasom pour Korea.net et Kang Seong-cheol pour l’agence de presse Yonhap, photos Kim Yoon Hee

La violoniste Kim Yoon Hee est née à Jeju en 1991. Elle faisait déjà preuve d'un talent extraordinaire lorsque ses doigts ont pour la première fois touché cet instrument quand elle avait seulement 3 ans. Un an plus tard, elle intègre le programme préparatoire de l'académie de musique et des arts du spectacle de Vienne, en Autriche, dont elle devient la plus jeune élève et diplômée, à l'âge de 19 ans.

La jeune prodige ne s'est pas arrêté là. À 5 ans, elle collabore avec l'orchestre symphonique de Savaria, en Hongrie, avant de jouer avec l'orchestre symphonique et l'opéra de Trondheim, en Norvège, à 13 ans, puis l'année d'après avec l'orchestre symphonique de la radio et de la télévision espagnole. Année après année, elle se produit avec les plus grands orchestres européens : les philharmoniques de Stuttgart et de Monte-Carlo ainsi que l'orchestre national espagnol et l'orchestre symphonique de KBS.

Kim Yoon Hee réside actuellement à Vienne et se produit en Europe, aux États-Unis et en Corée. Elle a eu pour l'habitude, jusqu'à ses 20 ans, de jouer du violon jusqu'à 10 heures par jour. Aujourd'hui encore, elle consacre encore sept à huit heures par jour à son art.

Korea.net et l'agence de presse Yonhap ont rencontré cette virtuose du violon à l'occasion de son concert avec l'orchestre symphonique de Jeonju qui a eu lieu le mois dernier.

Comment avez-vous commencé à jouer du violon ?

J'ai en fait commencé par le piano. J'ai un caractère légèrement hyperactif, alors je m'ennuyais à rester assise et à taper sur les touches. J'ai découvert le violon par l'intermédiaire d'une connaissance de ma mère à l'âge de 3 ans. Cet instrument me semblait plus amusant à apprendre parce qu'il se joue debout. Je dois dire que ma mère a aussi eu beaucoup d'influence en me faisant écouter des concerts de musique classique dès mon plus jeune âge. 

Vous avez été la plus jeune élève à intégrer le programme préparatoire de l'académie de musique et des arts du spectacle de Vienne.

Environ un an après avoir découvert le violon, j'ai rendu une courte visite à ma tante maternelle, qui vivait à Vienne. Elle m'a parlé d'un professeur de violon réputé pour la qualité de son enseignement et qui offrait des cours aux jeunes prodiges. Elle m'a donc recommandé de prendre des cours particuliers avec lui. Je me suis donc présentée devant lui et j'ai joué sans trop réfléchir. À la fin de ma prestation, le professeur a dit à ma tante qu'il me voulait comme élève. C'est donc comme ça que j'ai fini par rester vivre à Vienne !

Lors de vos collaborations musicales, avez-vous ressenti une certaine pression du fait de votre statut de « plus jeune violoniste de l'histoire » ?

Non. Cela ne m'a pas gêné parce que je ne pensais pas qu'il était si important d'être la plus jeune. Bien sûr, c'est formidable de voir un enfant se produire sur une grande scène, mais ce titre ne servait qu'à me présenter au public. Le plus important, c'est de bien jouer. Ma seule préoccupation était de savoir comment mieux jouer.

Est-il difficile de collaborer avec un orchestre en tant que violoniste solo ?

J'avais 5 ans quand j'ai collaboré avec un orchestre pour la première fois. Il n'est pas facile pour un enfant de cet âge de jouer avec un orchestre. Mais c'était mon premier contact avec la scène, et j'ai aimé le fait de devoir s'entraîner sans fin afin de monter sur scène et de présenter une œuvre pour laquelle on a travaillé sans relâche. Il est nécessaire, pour bien savoir jouer, d'être capable de ressentir, lors des répétitions, à la fois de la joie, de la fierté, mais aussi de la douleur et de la difficulté. C'est aussi pour l'amour de la scène que je ressens toutes ces émotions.

Le 17 juin, Kim Yoon Hee joue le Concerto pour violon n° 3 de Mozart lors de son concert en collaboration avec l'Orchestre philharmonique de Chungbuk au Cheongju Art Hall à Cheongju, dans la province de Chungcheongbuk-do.

Kim Yoon Hee joue le « Concerto pour violon n° 3 » de Mozart lors de son concert avec l'orchestre philharmonique du Chungcheong du Nord au Cheongju Art Hall, à Cheongju, le 17 juin 2023.


Quel est le concert qui vous a le plus marquée ?

Chaque représentation est importante ! Il est donc difficile d'en choisir une seule.

Je me souviens particulièrement de mon récital au Carnegie Hall de New York, quand j'avais 23 ans. À l'époque, j'étais très préoccupée par beaucoup de choses, et pas seulement la musique. Mais je devais jouer, alors j'ai serré les dents et je me suis préparée. Le jour du concert, j'ai soudain senti à quel point la scène était précieuse et une grande énergie monter en moi. Après l'ovation du public, c'est comme si toutes mes difficultés avaient disparu. C'était la première fois que je pleurais après une représentation. J'ai alors compris pourquoi il est important pour les musiciens d'être capable de ressentir une large gamme d'émotions et comment celle-ci affecte positivement la musique. J'ai beaucoup mûri grâce à ce concert.

Vous jouez du violon depuis 30 ans. Que faites-vous pour ne pas vous épuiser ?

Je vis pour la musique. Mon objectif est d'en faire le plus longtemps possible. Mon destin est indéniablement lié à la musique et au violon. La seule différence, c'est l'énergie que j'y consacre tous les jours. Quand je manque de forces, je fais du sport. C'est comme ça que je recharge mes batteries et que je trouve de nouveau l'énergie pour jouer. Je crois qu'il est indispensable pour tout musicien d'avoir un autre passe-temps que la musique.

Quelle est la critique dont vous vous souvenez le plus en tant que musicien coréen actif à l'étranger ?

Je regrette profondément d'avoir toujours voulu obtenir des critiques positives. Avant, je jouais dans l'espoir que ma musique plaise à tout le monde, mais ce n'est plus le cas. Je joue maintenant pour moi et non pour les autres. C'est pourquoi j'essaie désormais de ne pas prêter trop d'attention aux critiques.

Comment la popularité de la hallyu a-t-elle affecté le monde de la musique classique ?

Il y a encore 20 ans, il était incroyablement difficile pour un Asiatique de jouer de la musique classique sur une scène internationale. Mais aujourd'hui, cette question ne se pose même plus tant les compétences des musiciens coréens sont impressionnantes.

La soprano Sumi Jo a fait ses débuts en 1991 au festival de Salzbourg, le plus grand événement mondial de musique classique. Elle est la première et la seule Asiatique à avoir joué le rôle principal dans l'opéra principal du festival. Les nouveaux musiciens, comme les pianistes Lim Yunchan ou Cho Seong-jin, ont pu émerger en partie grâce au chemin tracé par Sumi Jo et d'autres artistes avant eux.

Quels morceaux avez-vous joués lors de votre dernière tournée en Corée ?

J'ai joué Mozart avec l'orchestre symphonique de Jeonju et je me suis rendu compte que les orchestres coréens s'étaient beaucoup améliorés. Le 10 novembre, la librairie Choi Ina, située dans le district de Gangnam à Séoul, organisera un récital au cours duquel les musiciens participants présenteront leurs livres préférés et joueront des morceaux correspondant à ces œuvres. J'y jouerai la Sonate pour violon n° 3 en ré mineur de Brahms. Je suis heureuse de jouer les chansons d'un compositeur que j'aime et je me réjouis de pouvoir rencontrer le public de cet événement.

Quel type de musicienne souhaitez-vous devenir ?

Je voudrais devenir une musicienne qui ressemblerait à un arbre. Les racines des arbres deviennent plus profondes et plus fermes à mesure qu'elles vieillissent. De la même manière, j'aimerais être capable de proposer une musique qui devient plus forte et plus profonde avec le temps.

La violoniste Kim Yoon Hee a été la plus jeune à entrer à l'école préparatoire de l'Université de musique et des arts du spectacle de Vienne (Autriche) à l'âge de 4 ans. Elle a donné de nombreux concerts à l'étranger et en Corée.

La violoniste Kim Yoon Hee.


dlektha0319@korea.kr

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